Les militants des droits humains et les membres de la société civile à Béjaïa ont décidé d'agir. À l'issue d'une rencontre-débat sur le sort des migrants et réfugiés subsahariens et syriens, tenue avant-hier, ils ont décidé d'interpeller le wali de Béjaïa en tant que représentant du gouvernement, afin d'amener celui-ci à traduire dans les faits ses engagements internationaux. À savoir de définir le statut de ces migrants ou réfugiés, d'organiser leur prise en charge sociale et sanitaire, mais aussi de les extirper de la rue et de les mettre hors de portée des réseaux mafieux. Initiée par les responsables du Centre de documentation et d'information sur les droits de l'Homme, la rencontre a surtout permis aux acteurs politiques et sociaux et aux militants de la Ligue algérienne des droits de l'Homme et d'Amnesty International Algérie de rédiger un plaidoyer qui sera remis aux autorités politiques. Les différents acteurs ont tous rappelé l'expérience vécue une année auparavant avec les mêmes migrants et réfugiés, subsahariens et syriens, qui sont arrivés à Béjaïa. Et de déplorer le fait qu'aucun enseignement n'ait été tiré. En effet, une année, quasiment jour pour jour, les mêmes militants se sont mobilisés et ont interpellé le wali de l'époque sur le sort de ces réfugiés ou migrants – l'absence de statut rend problématique la situation de ces migrants ou réfugiés qui ont fui la guerre, la famine ou la sécheresse. Les migrants subsahariens avaient été alors placés dans un centre d'accueil : le camp de toile de Saket. Ils avaient vécu dans cet espace plus d'un mois. Une dizaine d'entre eux avaient réussi à s'en échapper. Lorsque les militants des droits l'Homme avaient effectué une visite sur site pour constater de visu les conditions d'hébergement, les Subsahariens avaient émis le vœu de regagner leur pays. Ils avaient pour ambition de rejoindre l'Europe. Aussi, pour financer leurs voyages, ils faisaient la manche. Les autorités ont organisé le 18 novembre 2014 leur rapatriement ; pour les militants des droits de l'Homme, il s'agit bel et bien d'une expulsion, et dans des conditions déplorables. Mais c'était une fausse solution. La preuve : ils sont revenus plus nombreux. Il faut dire, explique Saïd Salhi, que ce sont les plus coriaces d'entre eux qui s'en sortent. Le vice-président de la Laddh a compté une cinquantaine de Subsahariens (Niger, Tchad, essentiellement) dans la seule ville d'Akbou. Un autre intervenant dira que quand l'Europe aura atteint son quota de réfugiés, elle refermera ses frontières. Et c'est l'Algérie, la porte de l'Afrique, qui va subir le poids d'un afflux plus massif de réfugiés. Autant alors se préparer, préconise-t-on, à organiser l'accueil de ces migrants sachant que le pays est signataire de toutes les conventions internationales. Mais les engagements ne sont pas suivis d'effet ; ils sont absents dans les lois nationales. Certains acteurs ont dénoncé une espèce de discrimination dans le malheur. Les Syriens sont admis à l'école. Ce n'est pas le cas des Subsahariens qui dorment sous les ponts. Un enseignant qui vit en France, Kaci Djebar, s'est interrogé sur la manière dont la wilaya comptait organiser la prise en charge de ces migrants et réfugiés ? Que peut-on leur offrir ? Un autre émigré, Zahir, s'est interrogé, pour sa part, sur la scolarité de ces migrants, d'où la nécessité, selon lui, de clarifier cette histoire de statut. Un militant des droits de l'Homme (Amnesty International) s'est interrogé, quant à lui, sur ces apatrides, ces enfants qui naissent sur le sol algérien et, parfois, dans des conditions d'hygiène déplorable. M. O.