L'arrestation mercredi à Alger du général à la retraite Hocine Benhadid après ses déclarations fracassantes à la presse n'en finit pas de soulever des interrogations. Est-ce le signe d'une crispation politique et d'une aggravation de la crise de légitimité ? Ou tout simplement les avatars d'une guerre des clans qui n'a pas encore dit son dernier mot. Malgré l'opacité dans laquelle est intervenue cette interpellation non moins spectaculaire, plusieurs sources évoquent une plainte du ministère de la Défense nationale (MDN) à son encontre. Ainsi, Benhadid serait accusé de "divulgation de secrets militaires". De quoi susciter la curiosité de dizaines de milliers d'Algériens qui ont pris connaissance de ses déclarations tonitruantes via le Net. Il est à se demander quelles sont précisément les informations qu'il n'aurait pas du dévoiler notamment lors de l'entretien qu'il a accordé au site électronique Maghreb Emergent, et ce, eu égard à l'obligation de réserve à laquelle il était astreint. Les lecteurs avertis seront d'autant plus surpris que le général Benhadid — et même d'autres — n'a pas été avare ces deux dernières années de déclarations fracassantes aussi bien sur la santé du Président que sur les compétences du chef d'état-major de l'armée ou encore sur l'état déliquescent de nos institutions. Pourquoi donc maintenant ? Son arrestation a coïncidé, en outre, avec celle de son fils, accusé de "port d'arme illégal", et ce, au moment même où les habitants d'Alger découvrent un renforcement drastique du dispositif de sécurité déployé dans la capitale. Par ailleurs, on ne peut occulter, en l'occurrence, l'avertissement — certains y voient une menace — du président du FCE, Ali Haddad, qui, au lendemain d'un dépôt de plainte contre le même Benhadid, a annoncé que dorénavant quiconque s'attaquerait FCE aura à en répondre devant la justice. Compte tenu de la nature des révélations rendues publiques par l'officier supérieur à la retraite que certains relèguent à de vulgaires propos de café de commerce, il est difficile pour de larges pans de l'opinion de ne pas croire dans ces conditions à une persécution politique sinon à une accusation montée de toutes pièces. Mais y a-t-il réellement panique à bord sur fond de crise économique profonde et de velléités de contestation populaire comme l'attestent plusieurs sources ? Quoi qu'il en soit, par sa dénonciation publique différemment interprétée, Benhadid n'aurait fait que donner l'alerte contre de mauvaises pratiques. Mais tout est une question de point de vue, n'est-ce pas ? À l'instar de l'arrestation du général-major Abdelkader Aït Ouarabi, dit Hassan qui avait été précédée d'une longue valse-hésitation, l'opinion reste, à ce jour, dubitative au sujet de ces arrestations. Il est à rappeler que le tribunal militaire de Blida avait placé ce chef de la lutte antiterroriste sous contrôle judiciaire en février 2014 avant de décider en août 2015 de signer son mandat d'arrêt pour des motifs "très graves". Sa défense s'accorde, d'ores et déjà, à dire qu'il s'agit d'une énième "affaire politique". Au-delà des arguties juridiques et des subtilités du code pénal, là où ils sont, ces officiers supérieurs continuent à croire, très certainement, avoir bien agi. Benhadid qui s'était présenté à l'opinion en témoin n'en a pas moins échoué comme accusé. Le contexte semble avoir changé. L'objectif même de cette arrestation a tout l'air d'être dissuasif. Terroriser à l'avance tous ceux qui auraient la tentation de critiquer le régime en place et ses dérives. M-C. L.