La démarche des "dix-neuf" semble plus destinée à faire barrage à un scénario qui se tramerait en haut lieu, plutôt que de s'inscrire dans la simple perspective de rencontrer le Président. La demande d'audience étant en soi une alerte sur un fait presque avéré. À savoir l'incapacité d'Abdelaziz Bouteflika à gouverner. La lettre rendue publique par le groupe des dix-neuf a visiblement obtenu l'effet escompté. L'alerte a d'abord largement inquiété et suscité des doutes parmi la société civile, s'agissant de l'aptitude du chef de l'Etat à gérer les affaires du pays. D'autant que la "remise en doute" engage, cette fois-ci, des personnalités connues pour être proches d'Abdelaziz Bouteflika. Une action qui vient conforter ce que n'a pas cessé de dénoncer l'opposition, laquelle d'ailleurs a applaudi la sortie du groupe des dix-neuf. Ensuite, la réaction des partis pro-pouvoir, qui ne s'est pas fait attendre et qui a révélé comme une panique à bord. C'est ainsi que le SG du FLN, Amar Saâdani, et le patron intérimaire du RND, Ahmed Ouyahia, visiblement pris de court, ont focalisé sur la personne de Louisa Hanoune, plutôt que de répondre au contenu de la lettre, destinée pourtant au Premier magistrat du pays. Amar Saâdani s'est laissé aller à son exercice préféré : dénoncer la main du désormais ex-patron du DRS, le général de corps d'armée Mohamed Mediène, dit Toufik, qui serait, selon lui, derrière chaque remise en cause du clan présidentiel. Il n'a d'ailleurs pas caché ses soupçons en déclarant ce samedi, à la presse, en marge d'une rencontre avec les élus du FLN, à Alger, qu'une partie des signataires sont "instrumentalisés par des parrains". Ceci, avant de citer nommément Louisa Hanoune, signifiant qu'"elle a perdu la boussole, depuis que ceux qui la parrainaient ne sont plus en poste". Comme si la SG du Parti des travailleurs était la seule signataire de la demande d'audience au président de la République. Ahmed Ouyahia est venu conforter cette "idée" faite de la démarche des "dix-neuf". Il a réduit l'action à la seule personne de Louisa Hanoune, ignorant les 18 autres personnalités connues pour avoir été toujours loyales au Président. Il n'a surtout pas lésiné sur les mots puisqu'il a soutenu, dans un communiqué rendu public ce samedi, que la lettre "dévoile l'identité de l'auteur de cette initiative, un chef de parti politique, déchaîné depuis quelques mois déjà contre l'Etat et contre son premier dirigeant". Allant encore plus loin, il a donné une interprétation erronée au contenu du message. "Le groupe des dix-neuf accuse Bouteflika de porter atteinte aux institutions de l'Etat et aux intérêts de l'Algérie", a-t-il souligné. Or, les signataires de la demande d'audience accusent l'entourage du Président plutôt que la personne d'Abdelaziz Bouteflika. D'où leur souhait de le rencontrer et leur "crainte légitime que la lettre ne lui parvienne jamais (...)". Le SG du RND, qui est néanmoins directeur de cabinet à la présidence de la République, a reçu en main propre le courrier des "dix-neuf". Dans sa sortie médiatique, il a signifié une fin de non-recevoir, omettant d'indiquer s'il a transmis la lettre ou non. Ce qui conforte les soupçons des "dix-neuf" qui redoutent que d'autres personnes décident à la place du Premier magistrat du pays. Sauf que leur démarche semble plus destinée à faire barrage à un scénario qui se tramerait en haut lieu, plutôt que de s'inscrire dans la simple perspective de rencontrer le Président. La demande d'audience étant en soi une alerte sur un fait presque avéré. À savoir, l'incapacité d'Abdelaziz Bouteflika à gouverner. Ce groupe a d'ailleurs sciemment précisé que dans le cas où la demande d'audience ne trouverait pas une réponse favorable, d'autres actions seront engagées. Ce qui, en somme, laisse entrevoir une feuille de route déjà tracée dont le but serait de faire avorter un plan de succession en cours. Ce qui suppose que les "dix-neuf" en savent quelque chose. M. M.