Les responsables du FLN et du RND, voire le Premier ministre, se seraient certainement fait une joie de préciser qu'ils ont été mandatés par le chef de l'Etat pour répondre aux "dix-neuf", si c'était le cas. Substitution. Huit jours après l'expédition de leur demande d'audience au président de la République, les dix-neuf personnalités nationales n'ont toujours pas obtenu de réponse officielle de l'institution destinataire. Le chef de l'Etat n'a encore ni réagi personnellement ni à travers la présidence de la République. En revanche, elles ont eu droit d'abord aux réactions affolées du secrétaire général du Front de libération nationale (FLN), Amar Saâdani, et du secrétaire général par intérim du Rassemblement national démocratique (RND), Ahmed Ouyahia, et, ensuite, hier, à celle mesurée du Premier ministre, Abdelmalek Sellal. D'aucuns auront aisément relevé que ni les deux chefs de parti ni le Premier ministre n'ont mentionné un mandat du président de la République à s'exprimer en son nom. Ils se seraient fait une joie de le préciser si c'était le cas. En se rendant promptement, Saâdani et Ouyahia plus que Sellal, cela dit, à une levée de boucliers dans laquelle l'impair politique côtoie la démesure, ils n'auront fait qu'apporter de l'eau au moulin des "dix-neuf" auxquels ils auront fourni, sans faire exprès, une raison supplémentaire de douter de la capacité de Bouteflika à encore gouverner le pays. Le président Bouteflika ne peut pas avoir parlé par la bouche d'Amar Saâdani qui, dans sa diatribe particulièrement virulente contre les "dix-neuf", a commis ce qu'aucun homme politique lucide n'aurait commis : demander aux Algériens d'interroger le président français François Hollande si leur Président gouverne ou pas. Il est vrai que Hollande, reçu en audience, a témoigné avoir trouvé Bouteflika d'une "grande alacrité", mais cela ne fait pas de lui la source indiquée pour répondre aux préoccupations des Algériens au sujet de leur Président. Les dix-neuf signataires de la demande d'audience à Bouteflika n'ont pas manqué de relever, à juste titre au demeurant, la "bévue" monumentale du secrétaire général du FLN. Tout comme ils n'ont pas manqué de faire remarquer qu'Ahmed Ouyahia n'a pas répondu à la grave accusation qui le concerne directement, à savoir qu'il pourrait ne pas remettre le courrier à Bouteflika. Un soupçon qui leur a dicté au demeurant de faire épouser à leur courrier les contours d'une lettre ouverte. Ils ont, d'ailleurs, soutenu publiquement qu'ils craignaient une obstruction des canaux institutionnels officiels d'acheminement. Mais pourquoi tarde-t-il toujours au chef de l'Etat d'intervenir pour édifier l'opinion sur la réalité de son pouvoir ? Serait-il isolé, comme craint par les "dix-neuf", confortés dans leur doute par les invectives qu'ils ont essuyées suite à l'alerte qu'ils ont lancée ? Une alerte qu'il y a tout lieu de prendre au sérieux, car la démarche qui la sous-tend n'a rien d'une coquetterie politique. De par l'amitié qu'ils ont toujours entretenue avec Bouteflika, des personnalités comme Mme Zhor Drif-Bitat (vice-présidente du Sénat) ou les moudjahids Abdelkader Guerroudj et Mohamed Lemkami (ancien diplomate) n'auraient pas souscrit à une démarche aux impacts politiques nécessairement lourds, s'ils n'étaient pas informés de bonne source. N'étant par ailleurs point crédules, ils n'ont pas pu être abusés par une manœuvre politicienne. S. A. I.