"Il avait du respect pour les vrais militants, mais n'avait aucune estime pour les usurpateurs politiques." Arezki Lakabi, ancien cadre du Front des forces socialistes (FFS), a côtoyé le défunt Hocine Aït Ahmed, notamment depuis son retour en Algérie après "l'ouverture" démocratique de 1989. Il reconnaît, d'emblée, qu'il n'est pas aisé d'évoquer l'homme. "J'ai eu le privilège et l'honneur de connaître Hocine Aït Ahmed au sein du FFS", a-t-il dit, précisant qu'à travers cette "relation" avec le chef historique "on a découvert un homme qui correspondait à l'image qu'on avait de lui avant de l'approcher de très près". "C'était quelqu'un de très fortement engagé", a témoigné M. Lakabi, ajoutant qu'il a consenti beaucoup de sacrifices, notamment sur le plan matériel. M. Lakabi a dépeint une personnalité peu portée sur "les caprices" de la vie. "Il était modeste", a affirmé l'ancien compagnon d'Aït Ahmed, soulignant que le défunt "était avantagé sur le plan physique". "Il était d'une grande taille et bien portant", et qui ne "lésinait pas sur l'effort", s'est-il rappelé, avant d'ajouter que "Dda L'Hocine avait le comportement et les qualités d'un grand sportif". À titre d'exemple, M. Lakabi se rappelle qu'Aït Ahmed, dès son arrivée tôt au bureau, il demandait à ceux qui étaient avec lui "de faire une marche à pied dont des moins jeunes que lui avaient des difficultés à suivre le rythme". "C'était quelqu'un de très actif", s'est remémoré M. Lakabi qui était, pour rappel, membre du 1er exécutif du FFS qui a organisé le retour au pays. "Cette forme physique était accompagnée d'une certaine hygiène de vie", a ajouté notre interlocuteur, précisant que le défunt chef historique "était quelqu'un de relativement sobre". "Chaque matin, il prenait une fiole d'huile d'olive au petit-déjeuner qui se résumait à des produits du terroir comme la galette ou le beignet que préparait son épouse", a-t-il encore témoigné. Quant à la cigarette, il a souligné que le chef du FFS "n'aimait pas qu'on fume dans les bureaux du siège". "Avant qu'il apprenne à vivre dans la clandestinité, je pense qu'il était discret", a dit M. Lakabi, précisant que les années de clandestinité qu'il a vécues, près de 40 ans, "l'ont formé à la discrétion et au secret". "Il avait l'habitude de dire : il faut dire ce qu'on fait et faire ce qu'on dit", se souvient encore notre interlocuteur qui a ajouté que Dda L'Hocine aimait la perfection et il était "pédagogique" dans ses rapports avec les autres. "Il aimait convaincre ses interlocuteurs et refusait de donner des ordres", se rappelle M. Lakabi pour qui Aït Ahmed "savait quand il fallait prendre une décision", du fait qu'il était "très lucide, aimait vérifier les informations et faire des recoupements pour s'assurer de la cohérence et de la véracité des faits et des informations qui lui parvenaient de partout". "Il recommandait aux militants d'être vigilants dans leurs propos et comportements parce que dans l'ambiance algérienne, les services de la SM, ensuite ceux du DRS, imposaient un climat inquisitif à travers la recherche d'attenter aux gens", a-t-il ajouté. Quant aux rumeurs distillées à son sujet, M. Lakabi a affirmé que cela "ne semblait pas trop l'affecter", parce que cela relevait "des racontars, des mensonges et des procès d'intention à son égard", soulignant qu'il avait "habitude à ce genre de bassesses". "Il s'était toujours situé au-dessus de tout cela", a-t-il ajouté. Quant à "ses opposants politiques", notre interlocuteur se souvient qu'Aït Ahmed ne mettait pas tout le monde dans le même panier. "Il avait du respect pour les vrais militants, mais n'avait aucune estime pour les usurpateurs politiques". "Il était pour le pluralisme et tout cela émanait d'une profonde conviction", a-t-il encore souligné. M. M.