L'écrivain, Karim Akouche, a été l'invité du café littéraire de Béjaia, samedi dernier. La petite salle du théâtre de la ville s'est révélée exigüe pour contenir tout son monde. Mais c'est ainsi : la grande salle est souvent occupée par d'autres activités et le public est rarement au rendez-vous. Fermons la parenthèse. Pour le poète, dramaturge et écrivain, Karim Akouche, qui vit depuis 2008 à Montréal, c'est une occasion de rencontrer une partie de son public et auquel il s'est confronté quatre année après la parution de son roman, « Allah au pays des enfants perdus ». Un livre publié en 2012 chez les éditions Dialogue Nord-Sud, Montréal et que republient les éditions « Frantz Fanon » de Tizi-Ouzou cette année. L'histoire de son premier roman se déroule au début des années 2010 à Ath Wadhou, un village perché de Kabylie, mais aussi à Alger. Il y raconte l'histoire des jeunes, désœuvrés, désorientés et en quête de sens dans un « Absurdistan », qui étouffe, qui stérilise tout : la réflexion, l'échange, toute idée, qui échappe au contrôle sociale des forces régressives, soit en djellaba ou en treillis militaire et qui tue dans l'œuf toute initiative allant dans le sens du bien-être collectif. L'Absurdistan est une appellation ironique, explique Karim Akouche ; dans cette espace, l'auteur décrit «l'Algérie d'aujourd'hui, ce pays où la réalité supplante la fiction, où se côtoient bureaucratie et islamisme, où le fanatisme dispute la première place à l'absurde.» Ingénieur de formation, Karim Akouche est pourtant littéralement happé par les livres, la poésie et le théâtre. Aussi, il peut légitimement faire de l'un de ses principaux personnages, Zar, un scientifique, qui ambitionne d'aller poursuivre ses études en France après s'être fait décourager dans son projet de recherche sur l'énergie solaire. Toutefois, avec la construction de la maison de Jeunes, avec le soutien financier de l'émigration, Zar y renonce momentanément à son projet pour venir en aide aux collégiens et lycéens du village. Une horde de sanguinaires viendra détruire ce lieu, qualifié de «débauche.» Leur chef s'est écrié : «Sales impies ! Au lieu de bâtir une mosquée pour les villageois, vous avez construit un lieu de débauche. C'est quoi cette peinture obscène ?... L'Algérie est une terre sainte, pas un b!....ces conneries, c'est haram !» Et pour s'attaquer aux alliés objectif des fondamentalistes islamistes, Karim Akache rapporte une anecdote, qui frise le ridicule : «il y a quelques années tout Alger puait. L'origine de la puanteur : deux bateaux chargés de pommes de terre pourries. Pourquoi ? Un général les a fait bloquer pendant plusieurs semaines, parce qu'un industriel, un concurrent, a eu le tort d'importer la même marchandise à la même période. Si Kafka revenait au monde, l'Algérie serait son sujet de prédilection. Bref, l'Algérie, c'est l'Absurdistan par excellence, autrement dit, c'est Le Château et Le Procès réunis, multipliés par mille.» M. Ouyougoute