Les manifestations de Ksar Chellala du 18 avril 1945 sont à l'origine des massacres du 8 Mai 1945. Ces événements, souvent méconnus, font pourtant partie de l'histoire contemporaine de l'Algérie et représentent, pour les acteurs du mouvement national et des historiens, "la première étincelle", sinon une des "principales étincelles" du déclenchement de la guerre d'Algérie. C'est l'une des conclusions qui s'est dégagée, hier, à Alger, lors de la journée d'étude sur le 71e anniversaire des manifestations de Ksar Chellala. Des manifestations ayant suscité la présence sur les lieux des autorités coloniales, dont le préfet d'Alger, Louis Perrelier, qui s'étaient d'ailleurs senties "humiliées" par les revendications portées par le PPA concernant le droit à l'Indépendance et le respect de la dignité des Algériens. Initiée par l'Organisation nationale pour la continuité des générations (ONCG), la rencontre a réuni des moudjahidine et d'anciens compagnons de Messali Hadj, qui ont témoigné sur les "souffrances" du peuple algérien et des "jours noirs" de la colonisation, ainsi que des événements d'avril 1945 ayant entraîné l'exil de l'ancien président du PPA au CongoBrazzaville. Non sans plaider pour "une réconciliation totale entre Algériens". Dans leurs interventions, d'aucuns, à l'exemple d'un membre de la famille Melzi, ont observé que le colonisateur a exécuté "sans distinction" des militants du MNA, du FLN et même du PCA, en soulignant que ces militants avaient "tous crié : vive l'Algérie" avant leur exécution. D'autres ont rappelé que les manifestations de Ksar Chellala ont éclaté à la suite de l'arrestation de 4 militants du PPA, dont Saâd Dahlab. Pour Ali Aggoun, la journée du 18 avril 1945 est "une date historique importante" qui devrait être consacrée "journée nationale". Le SG de l'ONCG, Djilali Belgheliem, pour sa part, a insisté sur les positions de Messali Hadj en faveur de "l'indépendance totale" de l'Algérie. Notre organisation, dira-t-il, milite pour faire connaître toute l'histoire et les leaders du mouvement national, "sans exception". Signalons que la manifestation d'hier a été rehaussée par la présence d'un groupe d'universitaires et de journalistes, chercheurs en histoire, venus débattre sur "un passé récent", notamment celui des événements de Ksar Chellala. D'après Amar Khodja, Messali Hadj représentait "un danger" pour la France et était "le seul leader qui avait vraiment subi des pressions". "Messali est un des pères de la Révolution algérienne", a déclaré le journaliste et chercheur, faisant référence à l'émir Abdelkader et aux leaders formés à l'école du PPA/MTLD. De son côté, son confrère Mountasser Oubetroune a axé sur l'implication de De Gaulle dans "l'exil de Messali", dans "la répression" à Ksar Chellala et, plus tard, dans "les négociations". L'autre intervenant, Ahmed Touaguine, professeur à l'université de Mascara, a rendu hommage à Emilie Busquant, l'épouse de Messali Hadj, qui avait adopté la cause nationale, voire "toute la cause nord-africaine". Se référant à Susini, "la tête pensante de l'OAS", il a laissé entendre, plus loin, que la France coloniale a laissé derrière elle une relève. Les interventions suivantes de deux historiens, Mustapha Nouicer et Daho Djerbal, ont fait écho à celle de M. Khodja, quant à la recherche de "la vérité". En tant qu'universitaires, ce qui intéresse, c'est la vérité historique où qu'elle soit. Pour M. Nouicer, le moment est venu de "parler de toutes les parties, dont le MNA qui a joué un rôle pour allumer l'étincelle", sans oublier "ses martyrs". Un avis partagé par Daho Djerbal qui a salué "la ténacité des militants qui sont toujours là pour la vérité historique". Le directeur de la revue Naqd a, néanmoins, mis en garde contre "l'éloge d'une seule personnalité ou de certaines personnalités du mouvement national en général et de la guerre de Libération en particulier, au détriment de la base". Hafida Ameyar