Plus de 80% des nouvelles constructions, après 2003, ont été implantées sur des terrains non constructibles, sur les failles sismiques ou encore sur des terrains liquéfiables, a affirmé avant-hier le professeur Chelghoum Abdelkrim, directeur de recherche, expert en numérique et génie parasismique, président du Club des risques majeurs. S'exprimant lors du Forum de la presse, organisé par les journalistes de Boumerdès, M. Chelghoum a indiqué qu'aucun enseignement n'a été tiré depuis le séisme du 21 mai 2003 qui a frappé Boumerdès et une partie de la wilaya d'Alger, pis encore, la situation a empiré. "Avant, on évitait de construire dans des zones non aedificandi, aujourd'hui, on construit même sur des failles sismiques et des terrains à risques sous prétexte de l'inexistence d'assiettes", a-t-il affirmé, en citant de nombreux exemples où les règles parasismiques et d'urbanisme sont complètement bafouées comme c'est le cas de coopératives immobilières construites à Chéraga à proximité des oueds Zouaou, Kaouche et Beni Messous, ou encore à Boumerdès devant l'oued Tataterg, sur des conduites de gaz et d'eau ou à Sidi-Abdellah et Bouira. "Sans séisme, on a vu des cas d'effondrement du tunnel de l'autoroute Oued Louahch et de nombreuses autres anomalies repérées sur cette autoroute, que dire alors en cas de tremblement de terre ?", s'est-il interrogé. Il cite également le cas de la mosquée d'Alger, érigée sur un terrain qui n'a pas fait l'objet d'une étude sérieuse. "Il y a un problème au niveau de cet édifice et l'Etat doit le régler. Le ministre de l'Habitat doit être disqualifié en matière de gestion de cette mosquée mais aussi pour tous les autres projets de grandes infrastructures", dira-t-il, précisant que le projet est actuellement réalisé par des Chinois qui assurent eux-mêmes le suivi et les études, ce qui n'est pas conforme aux lois et notamment au code des marchés publics, "or, l'entreprise doit réaliser, en principe, ces travaux sous la coupe d'un bureau d'études, d'un bureau de suivi et d'un bureau de contrôle qui ne doivent, en aucun cas, être liés". M. Chelghoum avertit qu'en cas de séisme qui frapperait Alger, les degrés de dédommagement, d'effondrement et de disparition de personnes seront identiques à celui de Boumerdès. "Avec l'entrechoquement des bâtiments qui existent à Alger mais pas à Boumerdès, ajouté à cela le nombre d'habitants de la capitale, les dégâts seront plus importants", dit-il. L'expert s'interroge sur l'attitude du ministère de l'Habitat qui continue à ignorer les avis et recommandations des experts. "Le ministre ne doit pas s'occuper seulement des statistiques de l'AADL, mais il doit aussi s'occuper des autres missions comme la gestion des villes et le respect des règles d'urbanisme." M. Chelghoum préconise une structure nationale spécialisée en séisme et dotée de pouvoirs pour s'occuper de la ville, des règles d'urbanisme et du respect des normes. Sur la loi 08/15 relative à la conformité, il dira que c'est une formalité bureaucratique qui ne se repose sur aucun fondement. M. T.