De plus en plus d'acteurs politiques, tribaux et militaires, contestent la suprématie du MNLA au sein d'une CMA (Ifoghas) quelque peu affaiblie par son dernier face-à-face avec ses frères ennemis du Gatia (Imghad). Le nord du Mali a connu, à la fin de la semaine dernière, la naissance du Mouvement pour le salut de l'azawad (MSA), sous la conduite de l'ancien porte-parole du Mouvement national de libération de l'azawad (MNLA), Moussa Ag Acharatoumane. Ce nouveau mouvement politico-armé est lancé dans un contexte marqué par une recrudescence des violences armées dans le nord du Mali, opposant les frères ennemis de la Coordination des mouvements de l'azawad (CMA, ex-rébellion) au Groupe d'autodéfense des Touareg de l'Imghad et alliés (Gatia, membre de la Plateforme d'Alger, pro-Bamako). Ces affrontements ont fait des dizaines de morts et provoqué l'exode de centaines de personnes dans le Kidal et ses alentours, empêchant ainsi le retour tant attendu de la stabilité dans cette région du Mali. Ces violences ont sérieusement freiné la suite du processus de mise en œuvre de l'Accord d'Alger, signé en deux temps à Bamako le 15 mai et le 20 juin 2015. Mais c'est surtout "la gestion unilatérale de la CMA" à Kidal qui a provoqué cette scission au sein du MNLA, selon la résolution politique qui a sanctionné deux jours de rencontre à Tin-Fadimata, près de Gao (centre-est). Dans la résolution politique de la rencontre de Tin-Fadimata, le nouveau mouvement "prononce solennellement la démission pure et simple de toutes les populations concernées par la présente rencontre, de même que leurs responsables civils, militaires et politiques des organes et des instances du MNLA, du HCUA et du MAA-CMA". Au vu des récents développements de la situation sécuritaire dans le nord du Mali, une telle dissidence était prévisible, notamment au sein de la population qui n'a de cesse de réclamer le minimum de conditions de vie et de sécurité dans cette région du pays, où les groupes terroristes islamistes et les bandits sèment la terreur dans les villages isolés et sur les routes principales. Par ailleurs, tout en affirmant décider de "rester dans l'accord d'Alger", le MSA affirme également, via son fondateur M. Acharatoumane, que "cette nouvelle organisation est un plus pour la CMA, du moment qu'elle reste fidèle à l'idéologie de départ et renforce la dynamique interne et l'équilibre" politique. Ce dernier dément l'information relayée par la presse malienne sur l'existence d'une base militaire dans la région de Ménaka, qu'il dirigerait lui-même. "C'est une ancienne base qui n'existe plus depuis la prise de Ménaka (centre-est)" par les membres du Gatia en avril 2015, a-t-il précisé. Les fondateurs du MSA accusent aussi les responsables de la médiation internationale d'avoir failli à leur devoir d'éviter le pire à Kidal, qualifiant d'insuffisantes les mesures prises pour le retour au calme dans cette ville du Nord, objet d'une guerre d'influence entre les deux communautés targuies, les Ifoghas et les Imghad. Ainsi, l'arrivée du MSA sur le terrain du jeu politique et même militaire, dans le nord du Mali, ne fera que compliquer davantage une situation déjà complexe. Car, il y a quelques semaines, un autre mouvement politique-militaire a vu également le jour au sein des Peuls, pour officiellement défendre les intérêts de cette communauté, victime de beaucoup d'injustice et de marginalisation au Mali. La peur de rater le train du développement, à l'issue de la future configuration politique, sociale et économique qui se met en place dans le nord du Mali, dans le cadre de l'accord de paix, a ravivé les tensions intercommunautaires dans cette partie du pays. Certes, les acteurs internationaux du processus de paix ont déjà averti sur les défis qui attendaient toutes les parties impliquées dans cette crise malienne. Mais ont-ils prévu de tels scénarios, comme la naissance de nouvelles entités politico-armées au moment même où la mise en œuvre de l'accord de paix a franchi une étape charnière ? Lyès Menacer