Le président de la commission des finances à l'APN, Bedda Mahjoub, revient sur la dernière annonce du ministre du Commerce, Bakhti Belaïb, portant projet d'autorisation d'importation de véhicules d'occasion, évoquant notamment les impacts attendus sur le marché, sur le Trésor public et sur l'industrie automobile naissante en Algérie. Liberté : Le ministre du Commerce a annoncé l'inscription dans l'avant-projet de loi de finances 2017 l'autorisation d'importation de véhicules d'occasion. Quelle appréciation en faites-vous ? Bedda Mahjoub : Cela fait longtemps que j'ai fait des amendements quant à cette question, mais en vain. Cette décision est tout à fait normale et logique. Il faut rappeler que la facture de l'importation des véhicules vient de baisser, alors qu'elle était de 5 et 6 milliards de dollars, chaque année. En premier lieu, nous ne pouvons pas laisser environ 15 milliards de dollars en deux ou trois ans, pour quelques concessionnaires. Ensuite, pratiquement tous les concessionnaires ont des bilans négatifs. Sincèrement, il n'y a pas une valeur ajoutée pour le Trésor public. À cela s'ajoute un besoin accru des devises. Et le plus important, je pense, il y aura une décision sage d'organiser cela par rapport aux banques, notamment en appliquant un autre taux de change que celui pratiqué actuellement par les banques. Cela étant, il s'agit d'une bonne décision et j'espère qu'elle sera concrétisée. Mais a-t-on pensé à l'impact financier d'une telle décision sur le Trésor public au moment où l'on parle de rationalisation des dépenses publiques ? Je suis désolé, mais on n'a jamais dit qu'il fallait utiliser les devises de la banque. Parce que les devises ont profité jusque-là aux concessionnaires, à travers des transferts illicites, pas aux citoyens ordinaires. De plus, quel modèle de voiture importent-ils ? Que de la racaille ! çà c'est de la pure vérité. La décision tombe au moment où l'Algérie est en train d'encourager l'industrie locale de l'automobile. Ne pensez-vous pas qu'elle signe la mise à mort de cette industrie alors qu'elle n'est qu'au stade embryonnaire ? Cette décision est inévitable. Elle sera obligatoire même avec l'adhésion à l'OMC, puisqu'elle figure parmi les conditions d'accès à cette organisation. Il reste que celui qui croit au marché algérien et installe une usine en bonne et due forme et qui sera concurrente, sera toujours le bienvenu. Nous sommes pour l'ouverture du marché, mais il faut qu'il y ait une véritable industrie. Or, à présent, celle-ci n'existe pas. Donc cette industrie ? On ne doit pas se mentir à nous-mêmes. Pour le moment, les projets restent. Quant à la mesure annoncée par le ministre du Commerce, elle peut être abandonnée lorsque les concessionnaires afficheront une réelle volonté d'installer des usines. Concrètement, est-elle applicable dans la situation actuelle du pays et du marché ? Tout dépendra de la volonté politique du gouvernement. Je ne fais que donner mon avis personnel. Il y a un ministre qui impose aux concessionnaires de mettre en place des usines, faute de quoi ils ne pourront plus importer des véhicules, en même temps on s'apprête à autoriser l'importation de véhicules d'occasion, ne pensez-vous pas qu'on est face à deux démarches contradictoires ? Il n'y a aucune contradiction. Il s'agit maintenant de trouver le moyen de réduire au minimum les transferts de devises. Cela fait 15 ans, soit depuis 2005, que tous les moyens sont donnés aux concessionnaires mais en dépit de cela, on ne voit pas de grandes usines installées en Algérie. D'après ce que vous avez affirmé, on suppose que vous allez voter la disposition de la LF-2017 relative à l'importation de véhicules d'occasion ? C'est mon avis personnel d'économiste, que je donne, reste celui du parti et des autres membres de l'APN qu'on connaîtra au moment opportun. Propos recueillis par : Amar Rafa