Après que le ministre des Transports et des Travaux publics, Boudjema Talaï, eut déclaré la grève des travailleurs du tramway d'Alger "illégale", voilà le tour du directeur général de la Société d'exploitation des tramways (Setram) d'Alger de saisir la justice. Le ministre avait averti, au préalable, et sans donner de détails que son administration prendra "toutes les mesures légales et nécessaires pour mettre un terme à ce mouvement de protestation". Aussitôt dit, aussitôt fait : des mises en demeure ont été adressées à plusieurs centaines de grévistes les sommant de rejoindre leur poste, faute de quoi des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu'au licenciement seraient prises à leur encontre. Si "le droit de grève est garanti par la loi", tel que l'a reconnu jeudi Talaï, le ministre trouve, par ailleurs, "illogiques" certaines revendications émises par les travailleurs du réseau d'exploitation de la Setram, à l'instar de la "réduction des heures de travail à quatre heures". Cette fermeté opposée face à ce qui est qualifié de "mouvement anarchique" et de "revendications sans fondements et mensongères" va jusqu'au refus de négociation notifié jeudi dans un communiqué de la Setram, qui réaffirme à cet égard sa "souveraineté de décision". Les grévistes n'ayant pas respecté, il est vrai, la procédure légale notamment concernant le dépôt d'un préavis de grève, ils étaient, toutefois, loin d'imaginer être autant stigmatisés non seulement par leur employeur mais également par les pouvoirs publics sans compter les nombreux usagers en colère. Aussi, pour la Setram, la cause est, d'ores et déjà, entendue : il s'agit seulement de "meneurs aux desseins personnels qui font fi des efforts déployés pour assurer le bien-être du personnel". Pour leur part, les grévistes campent sur leur position en réitérant leur détermination à poursuivre leur grève jusqu'à satisfaction de leurs revendications qui, rappellent-ils, datent "depuis la création de l'entreprise en 2012 et restées sans suite jusqu'à ce jour". Il s'agit principalement de la révision de la grille des salaires, l'arrêt des licenciements abusifs, le reclassement des travailleurs et la garantie de leur sécurité sur les lieux de travail et de leur transport à bord du tramway. Chargée de l'exploitation et de la maintenance de tous les tramways d'Algérie, la Setram a dû faire appel à ses agences d'Oran et de Constantine pour l'envoi de conducteurs de rames de tramway afin de remplacer les grévistes et assurer, un tant soit peu, un service minimum aux usagers qui n'a été rendu effectif que depuis jeudi matin après une paralysie du trafic durant deux journées entières. De même que des bus de l'Etablissement de transport urbain et suburbain d'Alger (Etusa) et de transporteurs privés ont été mis à contribution pour l'occasion. Il est à rappeler enfin que la gestion de la Setram est dévolue au groupe français RATP, et ce, dans le cadre d'un accord pour une durée de 10 ans. À ce sujet, les grévistes appellent à une "révision des statuts de l'entreprise" qui, selon eux, ne servent pas "les intérêts des travailleurs". Mohamed-Chérif Lachichi