RESUME : Wahiba est bien triste et pleure. Elle se mariait et allait être séparée de sa fille Latéfa. La pénible vie qu'elle menait auprès de sa famille l'a poussée à accepter. Même ses parents en sont soulagés. La grand-mère ne s'inquiète pas pour Latéfa, elle s'en remettra vite… Latéfa, durant tout le week-end, a traîné, l'âme en peine, à travers la maison. Dans la pièce principale, il y a encore le métier à tisser où sa mère avait l'habitude de travailler. Il lui suffit de fermer les yeux pour la voir filer la laine entre les fils. Elle l'entend encore fredonner. Et pour que le charme ne s'évapore pas, elle n'ouvre pas les yeux. - Latéfa ! viens ma fille. L'enfant ne refuse pas d'aller se blottir dans les bras de sa grand-mère. Ces bras deviendront son refuge lorsqu'elle voudra trouver du réconfort. Sa mère lui manque terriblement et il est sûr que sans la protection de ses grands-parents, les femmes de ses oncles auront tenté de se servir d'elle comme elles l'ont fait avec sa mère. D'ailleurs, l'une d'elles, Zahia, pose le problème de sa scolarité. - Qui réglera les frais ? Et en plus, elle a toujours besoin de quelque chose. On ne s'en sortira jamais. En plus d'être une bouche de plus à nourrir, il faudra l'habiller et lui donner de l'argent de poche pour le déjeuner. - Pourquoi avoir gardé le silence aussi longtemps ? l'interroge hadja Nouara. Qu'est-ce qui t'empêchait de parler durant toutes ces années ? Le fait que sa mère trimait nuit et jour pour vous, et comme, maintenant, elle n'est plus là pour vous décharger des corvées, sa fille n'est plus la bienvenue ! Figurez-vous, dit-elle à l'intention de ses belles-filles, que je maudirai celle qui osera l'embêter. Vous aurez ma malédiction. Elle n'est qu'une enfant, et tant que moi et son grand-père serons en vie, elle restera ici et ira à l'école. - Son père n'a jamais donné la pension qu'il doit, depuis des années, insiste Zahia. Pourquoi ne pas l'attaquer en justice ? C'est sa fille, il lui doit bien ça. - Je ne chercherai pas après ses sous, rétorque hadja Nouara. Elle fait partie de notre famille, elle a droit à tout, au même titre que vos enfants. Il faudra vous le mettre en tête une bonne fois pour toutes ! - Il faudra dire ça à ton fils, lorsqu'il se plaindra de ne pas avoir un rond en poche ! Latéfa, qui s'est toujours sentie de trop, se demande souvent ce qu'elle deviendra s'il arrive malheur à ses grands-parents. Ils sont si vieux, si fragiles. Elle a peur qu'une grippe les emporte. Après, elle se retrouvera seule. Et elle ne peut pas compter sur sa mère. Boualem, son mari, a été très clair sur ce point. Il refuse de la prendre sous sa tutelle. Elle sera contrainte à aller vivre chez son père et sa femme. Elle ne les connaît pas. Elle ignore comment les choses pourraient se passer entre eux. Cependant, elle sait que si sa grand-mère continue à se quereller avec ses belles-filles, sa situation deviendrait critique. - Laisse grand-mère, la prie-t-elle. Ne t'énerve pas. Ce n'est pas grave. S'il le faut, je ferais ce que je pourrais, propose-t-elle. Je pourrais surveiller les petits cousins, balayer. Tu sais, je suis grande. Je peux être utile. - Contente-toi d'étudier ! Le reste, je m'en occupe. Hadja Nouara était décidée à avoir le dernier mot. Elle refuse que l'enfant néglige sa scolarité pour plaire à ses tantes. - Non, tant que je serai en vie, tu iras à l'école et il ne te manquera rien. Ne me déçois pas. Tu as la chance d'aller à l'école. Il faut que tu réussisses. Tu comprends ? C'est important. L'enfant acquiesce d'un hochement de tête. Pour rien au monde, elle ne la décevrait… (À suivre) A. K. [email protected]