RESUME : Latéfa a quatorze ans lorsqu'elle perd sa grand-mère. Son père vient la récupérer. Sa femme tente de nouer une vraie relation avec Latéfa. Cette dernière lui en veut. Elle aurait voulu ne jamais vivre avec eux, même si sa mère lui conseille d'apprendre à les aimer. Son passage au lycée va lui permettre de vivre loin d'eux… Latéfa est persuadée que dieu a entendu ses prières. En passant au lycée, elle n'allait plus vivre chez son père. Le lycée se trouve à plus de trente kilomètres, et en ces années 1980, celles et ceux qui veulent y étudier n'ont pas le choix. La plupart sont originaires d'hameaux lointains ou du village. Sans l'internat, ils auraient été nombreux à abandonner. Même si Mahmoud ne travaille pas régulièrement, il n'hésite pas à l'envoyer à l'internat. Il règle tous les frais, heureux de pouvoir se rattraper après toutes ces années. Sa femme Fathma l'a encouragé. - Elle est intelligente. Tu ne gaspilles pas ton argent, tu l'aides seulement à concrétiser son avenir. Elle mérite de réussir. - Elle a de la chance de t'avoir, réplique Mahmoud. Latéfa ne le réalisera qu'une fois de retour sur les bancs de l'école. Bon nombre de ses anciennes camarades n'ont pas pu aller au lycée. D'après des cousines, certaines ont été mariées, d'autres, qui sont dans la même situation qu'elle et qui ont des parents divorcés, sont restées à la maison pour aider leur marâtre. Latéfa, depuis qu'elle vit chez son père, ne faisait presque rien. Fathma s'occupait de tout, et si elle lui en avait laissé l'occasion, elle lui laverait les cheveux, les lui peignerait. Il a fallu qu'elle regarde autour d'elle pour voir qu'elle avait de la chance. Elle regrette d'avoir été injuste et froide avec elle. La jeune fille se promet que, durant les vacances, elle se rattrapera. Elle aurait dû écouter sa mère depuis le début. Wahiba ne s'était pas trompée sur Fathma. Une autre n'aurait pas hésité à la dénigrer, à la tenir responsable de l'échec de sa relation avec sa fille. Mais dès le début, sans même la connaître, son sixième sens lui avait soufflé qu'elle était de bon cœur. Latéfa aurait dû se fier au jugement de sa mère. Faute d'argent, et se refusant à ce que son père et sa belle-mère se privent pour elle, elle s'est arrangée avec eux pour ne rentrer à la maison qu'une fois par mois. Et quand elle rentre enfin, elle ne cache pas sa joie de les retrouver et se montre plus chaleureuse avec Fathma. Celle-ci l'attribue à l'éloignement mais elle est heureuse de se sentir aussi proche d'elle. Elle ne lui en parle pas mais toutes les discussions prennent un tour confidentiel entre elles. Fathma n'a jamais vu Latéfa si radieuse. En paix avec les siens, avec son passé, il lui est plus facile de sourire et même de rire. En son absence, Fathma lui tricote des pulls pour l'hiver et prépare des gâteaux ainsi que des petits plats pour son retour. Elle la gâte comme jamais. Comme si elle était sa propre fille. Latéfa, le cœur tranquille, se donne à fond dans ses études. Les résultats qu'elle obtient le prouvent. Tous ses professeurs s'attendent à ce qu'elle aille très loin dans ses études. Même ses parents l'espèrent et y croient. Les bulletins sont là pour prouver qu'ils n'ont pas rêvé. Car, en terminale, les notes de Latéfa chutent brusquement. Elle n'a aucun souci à la maison ni à l'internat. Ses professeurs, inquiets, convoquent son père. Il est tout aussi inquiet qu'eux et il n'a aucune réponse à leurs questions. Personne ne sait ce qui la bouleverse à ce point. Et comme elle est dans un lycée de jeunes filles et qu'il n'a aucun contact avec les garçons de son âge, nul ne peut se douter qu'elle puisse être amoureuse. (À suivre) A. K. [email protected]