L'opposition, qui participe aux élections, compte beaucoup sur la mobilisation des électeurs et citoyens pour empêcher, du moins atténuer l'ampleur de la fraude électorale. Le spectre de la fraude plane sur les élections législatives du printemps 2017 et les partis de l'opposition expriment ouvertement leurs craintes, maintenant que, certains parmi-eux, ont officiellement annoncé leur participation. Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), qui a été le premier parti membre de la Coordination des libertés et de la transition démocratique (CLTD) à annoncer son engagement dans la prochaine course électorale, le 7 octobre dernier, n'avait pas caché ses soupçons quant à une éventuelle tentative de fraude au profit des partis au pouvoir. Des craintes tout aussi partagées et relevées par le Mouvement de la société pour la paix (MSP), Islah et le mouvement Ennahda qui ont annonçé, avant-hier, samedi, leur participation aux prochaines échéances électorales. Une situation qui, à première vue, semble pour le moins paradoxale, car, pourquoi prendre part à un scrutin dont la transparence et la régularité ne sont pas garanties ? Contacté hier, le président du MSP, Abderrezak Makri, considère que la participation de son parti, mais aussi celle de l'opposition dans son ensemble répond surtout à une "démarche stratégique". Selon lui, "le boycott offrira une certaine légitimité au pouvoir, dès lors qu'il n'aura pas besoin de frauder au profit des partis-clientèles, partis qui seront seuls en lice pour les prochaines législatives". Abderrezak Makri estime aussi que "le processus de changement est la responsabilité de tous et que les citoyens devront, cette fois-ci, s'impliquer en se dirigeant massivement vers les bureaux de vote". Parce que, aux yeux du président du MSP, "un vote massif de la population gênera le pouvoir dans sa tentative de fraude, mais aussi lui fera rappeler combien il est illégitime lorsqu'il constatera que la majorité du peuple n'a pas voté en faveur des partis qui lui sont acquis ou proches". L'action se veut donc "psychologique", fait remarquer Abderrezak Makri, et ajoute que "plus le pouvoir se sentira illégitime, plus il cèdera sur des acquis démocratiques". Et, poursuit-il, comme "le peuple n'est pas encore prêt à investir la rue pour réclamer ses droits, nous allons l'encourager à s'exprimer, du moins, à travers l'urne". De son côté, le secrétaire général du mouvement Ennahda, Mohamed Douibi, explique que "le combat politique en Algérie comprend plusieurs obstacles, entre autres, la fraude, et si nous abandonnons à chaque fois qu'il y a obstacle, nous n'allons jamais avancer". Une raison pour laquelle il estime qu'"il est de la responsabilité des partis de l'opposition de ne pas boycotter les prochaines échéances électorales, car si ces derniers renoncent, la population fera de même vis-à-vis de son droit de participer à la vie politique dans le pays". Une situation, relève-t-il, qui "arrange le pouvoir", sachant que "le terrain lui sera libre et favorable". Au RCD, le secrétaire national à la communication, Atmane Mazouz, fait d'abord remarquer que "la question de la participation a été décidée par le Conseil national, instance souveraine du parti". Mais s'agissant de l'aspect stratégique, notre interlocuteur considère qu'"à travers cette participation, une observation citoyenne sur le terrain pourra faire face à la machine de la fraude du pouvoir". Aussi que "les Algériens ont des difficultés à se faire entendre", que "la situation sera encore plus difficile dans les années à venir" et que "la société algérienne aura besoin d'être accompagnée par des députés", conclut-il. Mehdi Mehenni