"Ce qui se passe à Ghardaïa se fait en dehors des lois de la République. Il y a des personnes déléguées qui agissent en dehors de toute légalité", a affirmé hier Me Salah Dabouz. Loin des feux de la rampe, oubliée par les médias depuis sa "normalisation autoritaire" décidée par les pouvoirs publics après les violences et turbulences qu'elle a connues ces trois dernières années, la ville de Ghardaïa semble se morfondre à retrouver sa sérénité d'antan. Pire, la situation y est visiblement "insoutenable" et un "climat de peur" plane toujours sur la population locale, à se fier au témoignage de Me Salah Dabouz, président d'une aile de la Laddh et, néanmoins, avocat de certains détenus de Ghardaïa dont Kamel Eddine Fekhar que les autorités accusent de velléités sécessionnistes. "Ce qui se passe à Ghardaïa se fait en dehors des lois de la République. Il y a des gens délégués qui agissent en dehors de toute légalité", a affirmé, hier, Me Salah Dabouz lors d'une conférence de presse organisée au siège du MDS à Alger. Selon lui, la situation à Ghardaïa est "intenable". "Elle est transformée en région du crime", dit-il. "Ghardaïa est livrée aux services de sécurité et beaucoup d'agents ne sont pas formés pour gérer politiquement et socialement la situation", ajoute-t-il. Etant sous contrôle judiciaire, Me Dabouz, contraint à se présenter chaque jeudi devant les autorités judiciaires de Ghardaïa, a raconté que le 24 novembre dernier, un commissaire aux comptes répondant au nom de Daddi Nounou Nouredine a été arrêté devant un cabinet d'avocats et conduit au commissariat où on lui a signifié qu'il était convoqué depuis deux jours... plutôt, alors qu'il n'avait reçu aucune convocation auparavant. "On l'a arrêté, puis ils ont demandé au parquet de lui trouver un habillage juridique", accuse-t-il. L'avocat ne donne pas les raisons de cette interpellation, puisque la personne en question sera libérée quelques heures plus tard, mais il présume qu'elle serait peut-être liée à ses publications sur les réseaux sociaux. Daddi Nounou relate souvent les violations systématiques des droits de l'Homme. Le même jour en soirée, ce sont 26 Mozabites qui seront arrêtés au quartier Ahbass-Ouchour, en plein centre-ville. Leur "tort" ? "Comme chaque jeudi ou lundi, ils se retrouvent ensemble pour réciter des versets coraniques. On ne comprend pas les raisons de leur arrestation", soutient Me Dabouz. L'avocat, dont les "déboires" et "harcèlements judiciaires" seraient liés à ses actions en faveur des détenus — "Ils ne veulent pas que la situation des détenus soit portée à l'opinion", soutient-il —, affirme, par ailleurs, qu'il a rendu visite à certains détenus, notamment ceux qui observent une grève de la faim depuis douze jours. "Kacem Soufghanem a arrêté au bout de six jours et Sriaâ au bout de trois jours, quant à Kamel Eddine Fekhar, il a décidé de poursuivre la grève jusqu'à sa libération ou la mort", assure Me Dabouz. L'ancien responsable local de la Laddh décrit comme "un cadavre ambulant et essoufflé", réclame, poursuit l'avocat,"une action judiciaire contre l'ex-général Toufik pour crime contre l'humanité puisque Saâdani l'a désigné comme étant derrière les événements de Ghardaïa", "la libération de tous les détenus". Il informe, enfin, que "l'administration pénitentiaire ne respecte pas le rite ibadite des détenus". Par ailleurs, le président de la Laddh a dénoncé la légalisation des violations des droits de l'Homme dans certains textes de loi. "La Laddh ne va pas se taire", conclut-il. Karim K.