"Lui c'est juste un minet (il pointe l'accusé du doigt)... Parce que la victime est une avocate, vous voulez incriminer tout le monde." Le procès en appel dans lequel Dj. Mohamed Yacine, 27 ans, comparaissait, lundi, pour complicité de vol qualifié dans le cadre d'une affaire remontant à l'hiver 2013, avait commencé dans le calme. Le greffier avait rappelé que le 16 décembre, la dénommée T. Aïda avait déposé une plainte contre X pour le cambriolage de son appartement et le vol d'un lot de bijoux estimé à 2 milliards de centimes. L'enquête s'orientera vers un certain B. Nouri, 37 ans, connu des services pour des faits similaires. Interrogée, la compagne de ce dernier, M. Nadia, confirme avoir vu une valise contenant des bijoux en possession de Nouri qui, au cours d'une soirée arrosée, lui a d'ailleurs avoué être l'auteur du vol. Arrêté quelques jours plus tard, Nouri ne fait pas de difficultés pour reconnaître les faits, et l'enquête aboutit également à l'interpellation de présumés complices, dont Dj. Mohamed Yacine. Tous sont inculpés pour le cambriolage et condamnés à différentes peines de prison, dont 15 ans de réclusion pour le principal accusé, B. Nouri. Lundi, au cours de son procès en appel, Dj. Mohamed Yacine, qui avait écopé en première instance de 5 ans de prison, s'est échiné à expliquer à la cour son innocence. "Je connais Nouri parce que c'est un voisin, nous jouons parfois au foot ensemble. C'est tout. Je n'ai jamais trempé dans un vol et je n'ai jamais participé au cambriolage de ma voisine." À la juge qui le confronte aux déclarations de Nadia qui dit "avoir entendu Nouri l'appeler au téléphone le lendemain du cambriolage", à un listing d'appels téléphoniques qui recense une cinquantaine d'appels échangés avec le cambrioleur, l'accusé rétorque ne pas connaître Nadia, mais avoir effectivement reçu un appel de Nouri lui demandant ce qui se passait dans l'immeuble pendant que la police était sur les lieux, mais nie avoir échangé 50 appels avec lui. "J'ai deux numéros de téléphone, et celui qui est concerné par cet échange n'est pas à moi." Les débats n'en étaient pas moins calmes et mesurés jusqu'à ce que la présidente appelle à la barre B. Nouri, sorti de prison pour la circonstance. Brusquement, le procès s'est enflammé et a pris une tournure plus violente. "Lui, c'est juste un minet (il pointe l'accusé du doigt)... Parce que la victime est une avocate, vous voulez incriminer tout le monde." Ni la colère de la présidente ni la proximité des agents de police ne calment Nouri. "C'est moi qui ai volé, je l'ai avoué et vous m'avez condamné à 15 ans, pourquoi continuez-vous à nous harceler ? Pourquoi me sortir de prison ? Le juge d'instruction a menti : cet homme n'a rien fait." Terriblement remonté contre la justice et les magistrats "solidaires de la victime parce qu'avocate", B. Nouri ne s'est calmé que lorsqu'il a été sorti de la salle d'audience. Une fois le calme revenu, le ministère public a prié la cour de ne pas se laisser abuser par le comportement de Nouri. "Pour moi, Dj. Mohamed Yacine est encore plus dangereux que B. Nouri. C'est lui la tête pensante alors que Nouri est juste un exécutant", a-t-il affirmé dans son réquisitoire. Le représentant du parquet a requis 15 ans de réclusion criminelle assortie d'une amende d'un million de DA. Dans sa plaidoirie, et s'appuyant sur la thèse d'une enquête orientée, l'avocat de la défense s'est insurgé contre les conclusions de l'enquête de moralité qui dépeignent son client comme un alcoolique et un voleur, craint par ses voisins. Rappelant que le principal accusé venait, avec la véhémence que l'on sait, de laver son client d'une quelconque complicité de vol, l'avocat précisera que M. Nadia, dont les déclarations constituent le ciment de l'accusation, est un témoin du 3e degré, qui devrait être considéré avec beaucoup de précautions. Il réclamera l'acquittement de son mandant. Après délibérations, la cour a confirmé la première condamnation et prononcé la peine de 5 années contre Dj. Mohamed Yacine. S. Ould Ali