Le président du parti islamiste a réservé sa réponse à l'émissaire du Président en expliquant qu'une décision d'une telle importance stratégique était du ressort du Majlis Echoura. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a rencontré, hier, le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Abderrezak Makri, pour lui faire une proposition de participation de son parti au prochain gouvernement dont les consultations ont déjà commencé. C'est le premier responsable du MSP qui en a fait hier l'annonce sur son compte Facebook à l'issue de la rencontre qu'il a eue avec M. Sellal. Le président de la formation islamiste confie qu'il a été contacté par des intermédiaires dont il n'a pas divulgué l'identité, pour une rencontre avec le Premier ministre qui, à l'occasion, lui a formulé une proposition du président de la République d'intégrer le gouvernement. À propos de sa réponse à son vis-à-vis, M. Makri assure qu'il lui a expliqué qu'il revient aux instances de son parti, en l'occurrence le Majlis Echoura, de trancher cette question après l'examen et l'annonce des recours déposés auprès du Conseil constitutionnel. Certes, le sujet fait débat, virant parfois à la polémique par presse interposée, depuis plusieurs mois, entre les deux principales ailes qui composent cette formation, à savoir celle traditionnellement participationniste et celle plutôt radicale dont les options se rapprochent plus de l'opposition. Mais les rapports de force semblent avoir lourdement penché ces derniers temps en faveur des partisans d'un retour dans le giron du pouvoir, une ligne tracée par l'ancien dirigeant du MSP, Mahfoud Nahnah. M. Makri, lui-même, n'avait d'ailleurs pas écarté, dans une déclaration tenue il y a quelques mois, l'éventualité d'une entrée au gouvernement selon certaines conditions. Une hypothèse qui, d'ailleurs, demeurait, d'après lui, fortement liée aux résultats des élections législatives. Au final, le score réalisé par le MSP à l'occasion de ce scrutin, où il n'a récolté que 33 sièges, a jeté un froid sur les rangs de la formation dont les deux principaux responsables, MM. Makri et Menasra n'ont pas hésité à dénoncer "une fraude organisée et à grande échelle" et un pouvoir qui "n'a aucune volonté de se débarrasser de ses vieilles méthodes de détournement de la volonté populaire et de domination à travers la fraude". Ces résultats ont, visiblement, été ressentis comme un séisme au sein du parti, au vu de la virulence des propos tenus par ces deux dirigeants. M. Makri, fidèle à la ligne dure de sa formation, n'avait pas hésité à marteler que le MSP allait "continuer sur la voie qu'il s'est tracée", celle de l'opposition, afin de "sensibiliser les citoyens et mobiliser le peuple algérien autour du changement". Menasra, qui plus est représente une icône de la faction entriste du parti, a même qualifié ces élections législatives de "jeu cousu de fil blanc" par le pouvoir. Certes, M. Makri a réservé sa réponse à l'émissaire du Président en expliquant qu'une décision d'une telle importance stratégique était du ressort du conseil consultatif (Majlis Echoura) du parti. Mais cette colère, qui s'est exprimée publiquement et de manière vigoureuse par les deux responsables, va-t-elle pour autant empêcher le parti de retourner dans les bras du pouvoir ? À l'évidence, le MSP se retrouve ainsi entre le marteau et l'enclume. Le MSP résistera-t-il longtemps à cette offre des autorités ? La réponse pourrait se cacher dans la déclaration publiée hier par le président du parti. Le concerné a, en effet, indiqué que le Majlis Echoura tranchera la question de la participation ou pas au prochain gouvernement "après l'examen et l'annonce des recours déposés auprès du Conseil constitutionnel". Une affirmation qui sonne comme un message politique à l'adresse des tenants du pouvoir et qui pourrait être interprété simplement comme une sorte de chantage destiné à lier une telle éventualité à une "revalorisation" du score aux législatives par le truchement du traitement des recours par le Conseil constitutionnel. Et la boucle est bouclée. Hamid Saïdani