Le porte-parole du FFS évoque, dans cet entretien, les enjeux qui entourent la dissolution des assemblées locales envisagée par les autorités. Liberté : Vous venez, encore une fois, de réitérer votre refus de vous retirer des assemblées. Si jamais les autorités décident d'aller jusqu'au bout, jusqu'où ira le bras de fer ? Karim Tabbou : Pourquoi nous retirer des assemblées ? Nous ne céderons ni devant le diktat du Chef du gouvernement ni devant le diktat de ses chargés de mission. Le recours à la dissolution est un acte de désespoir politique des autorités et surtout de leurs relais locaux. Dans ce bras de fer, on peut distinguer deux attitudes politiques différentes : notre attitude de parti, qui privilégie la proximité avec la population et celle des délégués autoproclamés qui, à défaut de mobiliser la population pour faire partir les élus, trouvent plus expéditif de faire la proximité avec les autorités. Nous continuons à nous battre pacifiquement au côté de la population. Il ne s'agit pas seulement de défendre les institutions locales, mais surtout de faire échec à la stratégie de normalisation de cette région et à l'entreprise de dislocation politique, économique et sociale du pays. Pensez-vous que la plainte déposée par vos élus contre Ouyahia a des chances d'aboutir ? A-t-elle été enregistrée? Je précise que nous ne sommes pas dans un Etat de droit. Le dépôt de plaintes par les élus du FFS contre le Chef du gouvernement est avant tout un acte politique. Nous sommes dans un Etat où la justice n'est pas rendue sur la base du droit, mais sur la base des injonctions, des commissions ou des relations. Les élus du FFS sont les seuls à avoir osé déposer une plainte contre un Chef du gouvernement, un ministre de la Justice quand les jeunes de Kabylie se faisaient assassiner de sang-froid par les services de sécurité. Dans un Etat de droit, un ministre de la Justice complice d'un tel massacre est passible de toutes les sanctions. Concernant les plaintes déposées, elles portent sur le qualificatif d'“indus” que le Chef du gouvernement a utilisé récemment pour parler des élus de Kabylie. Le Chef du gouvernement qui confond ses fonctions avec ses envies et qui agit tantôt en tant que président de l'interwilayas des archs, tantôt en sa qualité de Chef du gouvernement, et souvent en qualité de secrétaire général du RND, est mal placé pour qualifier les élus du FFS d'“indus”, lui dont la seule compétence est la fraude électorale. Quelle lecture faites-vous du refus des élus du FLN de partir ? Sans vouloir aucunement m'immiscer dans les affaires internes du parti, je vous rappelle que l'actuelle direction du FLN est l'émanation d'un putsch et non pas d'une quelconque compétition démocratique. L'appel de Belkhadem au retrait des élus du FLN en Kabylie obéit plus à un calcul de reconfiguration et de repositionnement organique interne au parti qu'à une quelconque volonté politique. Le refus des élus du FLN de se retirer de ces institutions montre l'écart qui existe entre la direction de ce parti, occupée dans le partage de la rente et le squattage du pouvoir, et une base militante ayant les mêmes préoccupations que les citoyens. Des informations font état de contacts secrets entre Ouyahia et Aït Ahmed. De même que Bouteflika aurait rencontré récemment à Genève le chef du parti. Confirmez-vous ces informations ? Je démens énergiquement ces allégations mensongères. Hocine Aït Ahmed est président d'un parti régi par des règles d'éthique et de transparence. Au FFS, nous sommes allergiques aux conclaves souterrains et aux négociations de coulisse. Vous avez annoncé l'organisation prochaine d'une action d'envergure. Peut-on en connaître la nature ? Nous avons un calendrier de travail, et nous comptons mener des actions de protestation non seulement sur ce qui se passe en Kabylie, mais aussi contre l'asphyxie politique, syndicale, associative que le pouvoir fait subir à la population dans toutes les régions du pays. Une action d'envergure nationale élargie aux acteurs sociaux autonomes et aux organisations de défense des droits de l'Homme est envisageable. Le débat est engagé au sein de nos structures pour mobiliser la population autour des revendications politique, économique et sociale. K. K.