Pour la saison 2017-2018, les maisons d'édition algériennes ont publié une belle brochette d'ouvrages entre romans, essais, nouvelles, recueils de poésie, histoire... Au bonheur des férus de lecture, ces livres seront disponibles en librairie et au 22e Salon international du livre d'Alger (Sila), qui se tiendra du 26 octobre au 5 novembre. Media-plus L'islam d'Espagne au XVIe siècle : Résistances identitaires des morisques (258 pages) de Bernard Vincent. Entre 1609 et 1614, près de 300 000 sujets du roi d'Espagne ont été expulsés de la péninsule ibérique. Ils étaient les descendants des musulmans contraints, un siècle plus tôt, à se convertir au christianisme pour échapper déjà à un exil forcé. Pendant presque cent ans ces nouveaux chrétiens, appelés le plus souvent Morisques, soucieux de demeurer sur leur terre et de conserver leur foi, même dans la clandestinité, ont été suspectés d'hérésie et d'intelligence avec les Ottomans ou les Barbaresques. Ils ont fait l'objet de politiques d'évangélisation, de discrimination et de répression qui ont provoqué des effets variés selon les lieux, les situations et les circonstances, de l'adhésion au christianisme à la rébellion ouverte. Il s'agit ici d'analyser comment, dans ce cadre, les Morisques ont répondu à l'arsenal des mesures les concernant et ainsi cerner les identités construites par une minorité soumise à une vaste entreprise d'assimilation. Bernard Vincent est directeur d'études émérite de l'Ecole des hautes études en sciences sociales. Il a publié de nombreux travaux sur l'histoire du monde ibérique à l'époque moderne et sur celle des relations entre chrétienté et islam en milieu méditerranéen. Il a dirigé, avec Jocelyne Dakhlia, en 2011 l'ouvrage collectif Les musulmans dans l'histoire de l'Europe. Une intégration invisible, parue chez Albin Michel. Prix : 1 200 DA. Sonia, le calvaire au féminin (320 pages) de Yasmina Gharbi-Mechakra. Ce livre est un hommage à toutes les femmes qui ont fréquenté le Centre d'écoute Nedjma. Celles qui sont venues pour "vider leur sac" parce qu'elles n'en pouvaient plus. Celles dont la patience a atteint les limites. Celles qui ont franchi le pas de venir au centre pour ne pas tout abandonner et quitter leur foyer. Ce n'est que la transposition d'histoires vécues pour tenter de faire toucher du doigt à tous les négateurs la réalité de la violence faite aux femmes et aux filles. Les négateurs pensent que les femmes veulent "tous les droits", et ils ont peur pour leurs droits. Or, cette prétendue "expansion" des femmes n'est qu'un acte de survie, une voix qui veut exister, être reconnue comme différente mais respectée. C'est en tous cas un des résultats auxquels on parvient quand on a écouté une femme en détresse. Née à Meskiana, Yasmina Gharbi-Mechakra vit à Constantine où elle a fait ses études secondaires et enseigné le français pendant trente-quatre ans. Sonia, le calvaire au féminin est son deuxième roman. Prix : 1 000 DA. Lettres à Abel (120 pages) de Maï-Do Hamusultane. Un roman poignant et attendrissant sur l'amour sans bornes d'une mère pour son fils ! Une femme écrivain et cinéaste ; un petit garçon de 3 ou 4 ans. Le père ? Une belle histoire d'amour, entre la France et le Maroc, puis la séparation, et la garde de l'enfant de moins en moins confiée à la mère, au travers d'expertises psychologiques suspectes. Tout au long d'une année, de l'automne à l'été, la maman écrit à son enfant. Des lettres ? Plutôt un dialogue avec l'absent, dialogue en fait avec soi-même, une remémoration de son vécu de femme-mère à la fois heureuse et délaissée, rejetée par les siens et la société. Sur fond de voyages entre Paris et Tanger, voire même Marrakech et l'Iran. Maï-Do Hamisultane, romancière et psychiatre, d'ascendance à la fois chinoise, vietnamienne et marocaine, fut lauréate du prix Sofitel Tour blanche pour son second roman, Santo Sospir (La Cheminante, 2015). Co-auteur de l'ouvrage collectif Voix d'auteurs du Maroc : recueil de contributions de 30 écrivains marocains (Marsam, Rabat, 2016). Prix : 700 DA. El Kalima Recueil de poésie "Poèmes d'août", d'Amin Khan (illustration d'Arezki Larbi). Extrait : Ô fleur erratique, idée parfumée, du pays déserté, du fond des terres de mon être, où bat le cœur obscur, depuis l'enfance, jusqu'à l'ultime chagrin, je m'en suis remis à Dieu, pour le long chemin, et pour le rêve de chaque jour, aux paroles d'un devin. Prix 500 DA.
"Le roman des pôv'cheveux" de Lynda Chouiten. Quand Pôv'Cheveu tombe dans la soupe d'une élégante dame, il est chassé comme un moins que rien du restaurant chic où travaille son propriétaire. Commence alors une longue série de déambulations dans la capitale française, avec d'autres Cheveux déchus. À travers les récits de ces personnages capillaires, le lecteur découvre les destins croisés d'une multitude de personnages humains haut en couleur : Outoudert, un jeune homme pathétique qui traîne ses échecs jusqu'aux poubelles parisiennes où il cherche sa pitance ; Taous, la jeune femme timide qu'on force à se marier et à se voiler. Si les histoires des personnages humains forment une trame bien ficelée qui invite à réfléchir sur des questions telles que la mobilité sociale et la condition féminine, les aventures des Cheveux, qui sont les vrais héros du roman, se lisent, elles, comme une allégorie aux dimensions politiques et philosophiques. Prix 600 DA. "Six ans au maquis", témoignage de Yamina Cherrad. "Je me suis peu exprimée, durant plusieurs décennies. Amnésie volontaire ? Crainte de réveiller de vieilles douleurs ennemies ? Sentiment commun à la majorité écrasante des moudjahidine, et surtout des moudjahidate, qu'il n'y avait rien de spécial à dire, que nous avions simplement accompli un devoir et répondu aux impératifs de notre temps ? Fallait-il que se généralise la méconnaissance de notre Histoire par notre jeunesse qui en arrive à condamner le passé à cause d'un présent décevant pour que j'ajoute mon témoignage à ceux qui l'ont précédé ? Fallait-il que le temps déroule son fil jusqu'à mes quatre-vingts ans pour que s'impose à moi la nécessité de raconter ce que j'ai vécu pendant la guerre, pour que ressurgisse de ma mémoire ce que j'y avais profondément enfoui ?", extrait de la 4e de couverture. Prix 700 DA. Cine à Ghaza", de Amar Belkhodja. Ce journaliste-auteur, qui vient d'être consacré docteur honoris causa pour l'ensemble de ses travaux par l'université Abderrahmane-Ibn-Khaldoun de Tiaret, a toujours manifesté une vive sensibilité pour la question palestinienne. Une tragédie qui l'a incité à consigner dans cet ouvrage le cortège de massacres commis par Israël contre le peuple palestinien depuis Deir Yassine en 1948 jusqu'à Ghaza en 2014. L'auteur s'est imposé un devoir de mémoire par une compilation de textes, de citations et de commentaires qui constituent autant de pièces à conviction et actes d'accusation de l'Etat sioniste, en appelant un témoin à charge irrécusable : l'histoire de l'humanité. Prix 1500 DA. Recueil de nouvelles "Le Rossignol de Kabylie" et "Malika" d'Emmanuel Roblès. Pour la première fois depuis l'indépendance, son pays natal publie de lui un inédit, un recueil de deux nouvelles axées sur l'Algérie, dédiées à Tahar Djaout et à Mouloud Feraoun. Comme dans tous ses écrits, Roblès s'y montre attentif à l'homme d'Algérie et de Méditerranée que lui-même n'a cessé d'être. Prix 200 DA.
"Le secret de la lune" de Fatima Belhadj. Le secret de la lune est inspiré d'une légende orale berbère des Aurès. Ce roman original, mêlant poésie, mythologie berbère, tradition orale, culture arabe et féminisme, peut être aussi lu comme un conte allégorique sur l'éternel féminin et l'éternel masculin. Prix : 300 DA.