Le blocage dont est victime le groupe Cevital continue. Il reste incompréhensible, d'autant que les pouvoirs publics évitent de l'évoquer. S'ils ne l'assument pas publiquement, ils tardent à y mettre fin. La politique de "deux poids, deux mesures" se précise un peu plus chaque jour dans l'affaire du blocage du projet du groupe Cevital qui attend, depuis plusieurs mois, la levée de l'embargo pour le déchargement de ses équipements et l'installation de son usine de trituration de graines oléagineuses à Béjaïa où le groupe a déjà acquis un terrain, dans une zone industrielle, pour y implanter le projet. Pour sa part, le groupe Kouninef, dont le projet similaire est postérieur à celui de Cevital, vient de recevoir ses équipements au port Djendjen, dans la wilaya de Jijel. L'information a fait tache d'huile sur les réseaux sociaux, d'autant que le comité de soutien aux travailleurs de Cevital et aux investissements dans la wilaya de Béjaïa a publié, samedi, sur sa page Facebook, un poste où l'on lit : "Nous apprenons de sources sûres que le port de Djendjen, à qui nous souhaitons prospérité et réussite, est à l'heure actuelle en train de décharger, au quai GC/1, un navire-cargo, le "Da Cai Yun", en provenance de Chine, transportant le matériel destiné à l'usine de trituration de Nutris, filiale du groupe Kouninef qui sera implantée à l'intérieur même du port." Le comité, qui se réjouit, par ailleurs, de cette nouvelle pour le port de Djendjen, regrette le sort réservé au projet de Cevital depuis le mois de mars dernier. Si le groupe Kouninef a "réussi" à obtenir, en un temps record, toutes les autorisations et toutes les facilitations pour lancer son projet, le niet catégorique et injustifié de l'Entreprise portuaire de Béjaïa (EPB) opposé au déchargement des équipements industriels destinés au projet de Cevital reste encore de mise, perpétuant un déni de justice et un grave précédent dans les annales de l'entrepreneuriat en Algérie. Pourtant, le groupe Cevital, qui finance son projet sur fonds propres, a obtenu toutes les autorisations légales, dont celle du Conseil national des investissements (CNI), d'une part, et a bénéficié des avantages fiscaux de l'Agence nationale de développement des investissements (Andi), d'autre part. Ce qui achève de démontrer que ce projet a été conduit, depuis sa conception et dans toutes ses phases, dans la transparence, la légalité et en toute conformité avec les lois régissant l'activité industrielle en Algérie. Et, détail important qui achève de démolir les raisons invoquées par le DG de l'EPB, l'usine de trituration de graines oléagineuses du projet du groupe Cevital était prévue, dès le départ, hors du périmètre portuaire de Béjaïa, alors que celui du groupe Kouninef est basé dans l'enceinte portuaire de Djendjen. Le propos, ici, n'est pas de remettre en cause la multiplication de ce type d'usine en Algérie. En ces temps de vaches maigres où le gouvernement appelle à diversifier l'activité économique pour réduire la facture des importations, il est salutaire que l'industrie agroalimentaire connaisse un développement à même de permettre au pays de limiter ses dépenses en devises. Ce qui est moins compréhensible, c'est, à l'évidence, le blocage dont est victime le groupe Cevital. Un blocage que les pouvoirs publics évitent d'évoquer, sans doute pour ne pas l'assumer publiquement, mais sans pour autant y mettre fin. L'on rappelle ici qu'en avril dernier, pourtant, Ahmed Ouyahia, en campagne électorale à Béjaïa en sa qualité de SG du RND, s'était exprimé sur ce sujet. Depuis, l'affaire n'a connu aucune évolution, si ce n'est qu'elle a vu la naissance de plusieurs comités de soutien dans plusieurs wilayas et le soutien de plusieurs parlementaires et de personnalités politiques, ce qui, par la force des choses, est devenu, pour Cevital, un combat. Après la marche du 29 octobre dernier à Béjaïa, le dossier a atterri sur le bureau du Premier ministre, Ahmed Ouyahia. L'attente d'un dénouement continue, pendant que le comité de soutien aux travailleurs de Cevital et aux investissements s'attelle à la préparation d'autres actions, dont une marche nationale le 11 janvier à Tizi Ouzou. FARID BELGACEM