De nombreux vestiges et autres monuments témoignant de notre histoire se trouvent actuellement abandonnés à leur triste sort. Certains chefs-d'œuvre architecturaux et autres traces de notre mémoire, comme la Casbah, la muraille et autres mausolées à l'image du tombeau protohistorique (tumulus) risquent de disparaître à jamais si des mesures d'urgence ne sont pas entreprises. C'est un véritable SOS qui a été lancé par de nombreux spécialistes réunis à la Maison de la culture Rachid-Mimouni à l'occasion du Mois du patrimoine mondial. Des associations présentes à cette manifestation ne pouvaient que déplorer la situation lamentable dans laquelle se trouve la citadelle de Dellys dont les habitations de type andalou, situées dans la Casbah, ainsi que d'autres stigmates mémorables fortement endommagés par le séisme du 21 mai 2003. “Le véritable séisme, plus terrible celui-là, est l'oubli et l'indifférence”, constate un chercheur, visiblement consterné par les images et les photos récentes prises sur les lieux et projetées sur l'écran de la salle. Les mausolées de Sidi Khaled, Sidi Brahim, des passages souterrains datant des époques phénicienne et romaine, le phare Bengut, le rempart de la ville, Dar dey Hassen et d'autres chefs-d'œuvre, qui constituent une véritable mémoire collective, sont dans un état désastreux alors que les pierres qui les composent commencent à disparaître, ce qui rendra difficile toute restauration éventuelle. Un autre lieu hautement mystique, assigné lui aussi à une déliquescence certaine, est cette Casbah aux jardins paradisiaques, aux rues enchevêtrées et aux maisonnettes au style andalou. Pourtant, il a fait l'objet d'une étude de restauration en 1987, par le bureau d'étude de l'Urto de Tizi Ouzou, jugée remarquable par les universitaires mais, restée lettre morte en dépit des appels incessants des spécialistes et des associations établies à Dellys. L'universitaire M. Benamane, qui prépare un doctorat sur la ville de Ténès et sur Dellys et sa Casbah, a été abasourdi par les dernières nouvelles sur l'état de ce patrimoine. “Je suis affligé par ce qui se passe. Ce qui m'a vraiment le plus choqué, c'est l'état du mausolée de Sidi Brahem que j'ai visité et pris en photo avant sa destruction.” Mme Chaïd Saoudi Yasmina, enseignante universitaire, prépare un ouvrage sur Dellys. Elle ne va pas de main morte en parlant de la situation de la cité antique qu'elle qualifie de véritable désastre pour l'Algérie. La situation est davantage compliquée à cause de l'inexistence d'arrêté de classement de ce patrimoine. Certes, un arrêté a été signé en date du 14/08/2003 par Mme Khalida Toumi, ministre de la Culture, portant “ouverture d'instance de classement d'un bien immobilier” en vue d'un classement de la Casbah de Dellys parmi les biens culturels à protéger mais, selon les universitaires présents, ce document demeure toujours à l'état de projet. En attendant le démarrage de l'étude et le lancement des travaux tout comme la publication de l'arrêté portant classement de la Casbah comme patrimoine national, l'ancienne ville qui se trouve dans un état de dégradation très avancé risque de disparaître avant l'arrivée des experts à son chevet. M. T.