Le chef-d'œuvre du poète mystique persan Farid al-Din Attar, dit ‘Attar', qui chante le voyage de milliers d'oiseaux en quête de Simurgh, traduit et admirablement chanté par la divine Leili Anvar, en a ému plus d'un lors d'un récital organisé au CCA de Paris. L'auditorium du Centre culturel algérien de Paris (CCA) a abrité cette semaine un récital poétique d'une pureté magistrale. Le chef-d'œuvre du poète mystique persan Farid al-Din Attar, dit ‘Attar, qui chante le voyage de milliers d'oiseaux en quête de Simurgh, traduit et admirablement chanté par la divine Leili Anvar, en a ému plus d'un. "On raconte qu'un jour, tous les oiseaux du monde se sont réunis pour discuter de l'agitation qui règne sur leur vie. La huppe propose aux oiseaux de partir à la recherche de l'oiseau-roi la Simurgh, qui représente leur idéal. Mais certains doutent de l'existence de cet oiseau..." Accompagné du récitant Théophile de Wallensbourg et de l'excellente musicienne jouant du santûr iranien Farnaz Modarresifar, le trio a sublimé l'assistance en revisitant cette belle et antique poésie mystique qui remonte à la fin du XIIe siècle et qui raconte le périple de ces oiseaux qui, en fait, "se" cherchaient sans le savoir. "Nul ne voit, ni ne vit / Aucun pays au monde sans un roi à sa tête ! / Pourquoi notre royaume n'a point de souverain ?/ Il faut que cela cesse, nous en sommes certains / Peut-être pourrions-nous unir tous nos efforts / Et nous aller trouver enfin sa Majesté ?" Il s'agit donc du Cantique des oiseaux, ce récit initiatique qui apprend à l'homme à se poser des questions, à chercher quelque chose pour finalement y répondre de lui-même et la retrouver en lui-même. Au départ, ils sont 30 000 oiseaux qui s'envolent de la terre, et qui sont là à suivre la huppe, messager de Salomon et leur guide, qui doit les mener vers Simurgh, leur roi, l'incarnation du divin. Leur périple va durer et les embûches vont se succéder. Ils doivent affronter les pires dangers et traverser sept vallées. Ils sauront, au fur et à mesure, que pour arriver à destination, il va leur falloir plonger à fond dans cette "quête", chercher "l'amour", aller vers "la connaissance", vivre "le détachement", prêcher "l'unicité", apprendre "l'humilité" et affronter "la pauvreté". Apprentissage rude mais nécessaire que la huppe va leur faire tout le long de ces histoires contées par Leili Anvar et Théophile, le compagnon de route, sous les doigts majestueux de la musicienne Farnaz qui ajoutaient à cette ambiance mystique des notes de douceur et de mélancolie. Lors de cette épopée poétique, beaucoup vont y perdre leurs plumes, leurs illusions, leur vie. À ceux qui arrivent à la fin du périple – ils ne seront que 30 –, la huppe avouera : "Vous êtes tous les ombres de la Simurgh. Et comme on ne peut pas la regarder en face, elle a fait un miroir pour s'y réfléchir", et à la colombe qui demandera : "Quel est ce miroir ?", la huppe répondra : "C'est ton cœur." C'est dire la profondeur et la spiritualité qui se dégagent de cette poésie qui s'appuient sur la quête de la liberté, l'idéal de vérité, la divinité de l'amour et l'absolu nécessité de l'unicité. Par ces temps d'agitation à l'échelle planétaire, où le matériel prime sur le spirituel et où la violence fait ravage, revenir à de tels textes est un bon moyen de pousser à la réflexion et à la méditation... À quand ‘Attar, Leili Anvar et le Cantique des oiseaux en Algérie ? S. B.-O.