Le député des Français résidant au Maghreb et en Afrique s'apprête a déposer, au courant de cette semaine, une question écrite destinée au ministre des Armées, pour connaître les modalités d'application de la décision du Conseil constitutionnel, prise le 9 février dernier, et qui concerne le droit à la pension pour les victimes civiles de la Guerre d'Algérie. Cette juridiction, qualifiée de discriminatoire, avait, pour rappel, censuré la clause de la nationalité qui garantissait aux seules victimes françaises, d'attentats ou d'actes de violence pendant la période allant de 1954 à 1962, le droit d'obtenir une rente. De fait, les victimes algériennes ainsi que leurs ayants droit ont aussi désormais la possibilité de réclamer une pension. Du moins en principe. Car dans les faits, aucune décision exécutoire n'a été encore prise par le gouvernement. Le 22 février, M'jid El-Guerrab a saisi l'occasion de l'audition, à l'Assemblée nationale, de Claire Legras, directrice des affaires juridiques du ministère des Armées, pour lui demander comment son département allait procéder pour appliquer la décision du Conseil constitutionnel et si une mesure spécifique allait figurer dans le projet de loi de programmation militaire 2019-2025. Le député a fait valoir le rapprochement entre la France et l'Algérie et a plaidé pour la mise en œuvre rapide de la décision du Conseil constitutionnel. Dans son exposé, la représentante du ministère des Armées a affirmé, sans plus de précisions, que son département allait se conformer à la décision du Conseil constitutionnel et que des mesures seront prises. Mais cette déclaration n'a pas convaincu le député qui a décidé de réitérer sa demande par écrit. Sa question sera publiée dans le journal français et le gouvernement aura un délai de deux mois pour y apporter une réponse. Actuellement, le montant de la pension accordée aux victimes françaises est d'environ 150 euros par mois. Il n'y a pas de statistiques précises sur le nombre des bénéficiaires. Côté algérien, on ignore encore aussi combien de personnes ouvrent droit à cette rente. Pour beaucoup, il sera difficile de recenser les attributaires potentiels. S'ils ne sont pas encore décédés, les individus concernés devront sans doute démontrer qu'ils ont bel et bien été victimes d'attentats ou d'actes de guerre. Les ayants droit devront aussi fournir les mêmes preuves. C'est une affaire qui a, pour rappel, abouti à la décision du Conseil constitutionnel. Elle concerne un sexagénaire algérien, Abdelkader K., qui habite à Bordeaux. En 1958, il avait été blessé par balle à l'abdomen, à Mascara, alors qu'il avait huit ans. Une avocate toulousaine, Jennifer Cambla, a fait progresser son dossier au niveau de la justice. Le requérant a contesté la constitutionnalité du régime d'indemnisation et le Conseil constitutionnel lui a donné raison en estimant dans son arrêt que le législateur "ne pouvait, sans méconnaître le principe d'égalité devant la loi, établir une différence de traitement entre les victimes françaises et celles de nationalité étrangère, qui résidaient sur le territoire français au moment du dommage qu'elles ont subi". S. L.-K.