"L'option gaz de schiste n'empêche pas de développer les énergies renouvelables. Parce que dans le domaine des énergies renouvelables, on n'a pas besoin d'une phase de connaissances (aussi complexe) que celle liée au gaz de schiste", observe Nazim Zouiouèche, ancien P-DG de Sonatrach. Le gouvernement ne renonce pas à l'exploitation du gaz de schiste. Le ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, l'a réaffirmé lors de la conférence-exposition internationale sur l'industrie du gaz et du pétrole en Afrique du Nord (Napec) qui s'est tenue à Oran du 25 au 27 mars. Il a indiqué que la révision de la loi sur les hydrocarbures comportera des dispositions concernant les hydrocarbures non conventionnels, sans doute pour prévoir de nouvelles incitations destinées à stimuler le développement de ces ressources. Le gouvernement met donc le cap sur l'exploitation du gaz de schiste. Mais la question est de savoir s'il faut prioriser le gaz de schiste par rapport aux énergies renouvelables. Il convient de noter que le chantier gaz de schiste est déjà lancé avec les études en cours sur le potentiel hydrocarbures non conventionnels tandis que la mise en programme de développement des énergies renouvelables connaît une pause qui dure depuis plus d'un an, faute de visibilité et d'un arbitrage politique sur les orientations à donner pour accélérer l'application de ce plan. Contacté par Liberté, Nazim Zouiouèche, ancien P-DG de Sonatrach, spécialiste pétrolier, pointe du doigt l'énorme travail à accomplir pour pouvoir exploiter les ressources nationales en gaz de schiste. C'est un grand chantier qui demande au moins dix ans. Au terme de ce travail, il faut confirmer ou non si l'exploitation du gaz de schiste sera rentable en Algérie. Au préalable, et ce ne sera pas facile, "il faut passer par une phase d'acquisition de connaissances qui peut prendre au moins dix ans : vérifier tous les chiffres sur l'importance de nos ressources en gaz de schiste, forer beaucoup de puits durant cette phase d'exploration. C'est obligatoire de fracturer la roche mère. Il convient de répondre aux questions à l'issue de ces travaux de forage : qu'est-ce qu'on a comme possibilités de production ? Qu'est-ce qui est techniquement récupérable ? Qu'est ce qui est économiquement récupérable ? Il va falloir forer durant la phase exploitation 1 200 puits, voire 3 000 puits, pour produire 10 à 15 milliards de mètres cubes par an. C'est énorme. Il faut savoir qu'un puits de gaz de schiste peut perdre 60% de sa production après un an d'exploitation", explique Nazim Zouiouèche. Il faut au moins 300 milliards de dollars pour exploiter les ressources en gaz de schiste en Algérie, rappellent plusieurs experts. C'est donc un chantier complexe à réaliser qui demande beaucoup de moyens financiers et logistiques tout en n'étant pas sûr que ce soit rentable. L'ancien P-DG de Sonatrach préconise d'investir dans les énergies renouvelables tout de suite. "L'option gaz de schiste n'empêche pas de développer les énergies renouvelables. Parce que dans le domaine des énergies renouvelables, on n'a pas besoin d'une phase de connaissances (aussi complexe) que celle liée au gaz de schiste", observe-t-il. En somme, la priorité devrait être aujourd'hui l'accélération du programme de développement des énergies renouvelables dont les fruits peuvent être cueillis en beaucoup moins de temps que l'exploitation du gaz de schiste, avec beaucoup moins de moyens financiers et logistiques. D'autant que cela permettra de sortir du tout fossile dangereux pour l'avenir du pays. Cela n'exclut pas, cependant, le lancement parallèlement de la phase acquisition de connaissances et exploration des ressources en gaz de schiste. En attendant, la couverture de la demande domestique en énergie devrait être couverte par le développement des richesses pétrole et gaz conventionnels qui restent importantes : découverte récente, selon Alnaft, de 900 milliards de mètres de réserves de gaz au cours de ces dix dernières années et surtout par les économies d'énergie. "Le plus grand gisement de l'Algérie reste la rationalisation de la consommation d'énergie", ne cesse de marteler Chemseddine Chitour, spécialiste en énergie. K. Remouche