La wilaya de Bouira compte, selon les chiffres officiels, pas moins de 16 000 promoteurs ayant contracté des crédits bancaires dans le cadre des dispositifs d'aide à l'emploi Ansej, Angem ou Cnac. Ces entrepreneurs qui avaient, un temps, caressé le doux rêve d'être des "self-made-men", sont, aujourd'hui, chômeurs pour la plupart criblés de dettes et "harcelés" par les banques et les huissiers de justice. Le porte-parole du Collectif d'appui à la microentreprise (Came) de la wilaya, Djaâfar Hamichi, considère ces promoteurs comme les "victimes de tout un système". "Aux yeux de l'opinion publique, nous sommes des débiteurs qui ont jeté leur argent par les fenêtres au lieu de le faire fructifier. C'est archifaux", se défend-il. Et d'estimer : "Nous sommes des victimes dans la mesure où nous avons cru à la viabilité de cette formule, laquelle s'est avérée au final, n'être qu'une arnaque institutionnelle." Ce terme d'"arnaque", notre interlocuteur l'assume et le justifie. "Au départ, on nous a fait croire que ces prêts allaient être suivis, dirigés et surveillés par les pouvoirs publics. Nous nous sommes lancés dans l'aventure en croyant que nous étions encadrés par l'Etat. Cependant et dans les faits, nous nous sommes retrouvés seuls, désemparés, endettés et sans le moindre suivi", nous a-t-il confié. Selon ce coordinateur de wilaya, lui et ses camarades sont, actuellement, dans l'impasse. En effet, pour pouvoir rembourser leurs dettes, il faudrait d'abord, selon lui, que ces promoteurs entament leur activité. Or, à en croire le délégué du Came local, le marché est saturé. "À Bouira, par exemple, tout le monde s'est lancé dans le créneau du transport soit de voyageurs, soit de marchandises. L'offre dépasse de loin la demande, ce qui crée une paralysie générale. Les autorités avaient accordé des crédits à tout le monde, sans la moindre étude de marché. Tout a été fait avec amateurisme", soulignera-t-il. Pour notre interlocuteur, les différents dispositifs d'aide à l'emploi ont été un "piège" dans lequel la plupart des jeunes sont tombés et dont ils ne peuvent sortir maintenant. "L'Etat a tenté d'acheter la paix sociale avec ces dispositifs. Nous avons, certes, notre part de responsabilité, mais pas l'entière responsabilité, car nous avons été dupés dès le départ", a-t-il fait remarquer. Au sujet de la revendication du non-rééchelonnement des dettes, laquelle est défendue bec et ongles par le Came, Djaâfar Hamichi expliquera : "C'est un point auquel nous tenons particulièrement. Rééchelonner, cela signifie que nous allons être considérés comme des débiteurs lambda, car le dispositif d'aide va sortir de l'équation promoteur-banque-Ansej. Nous n'aurons que la banque comme seul interlocuteur et nous allons perdre au change, notamment le taux d'intérêt bonifié." En outre, nombre de promoteurs locaux dénoncent ce qu'ils qualifient de "harcèlement" des banques. "Les saisies se font de manière systématique, sans parler du chantage administratif. Dans la wilaya, nous avons une dizaine de saisies rien que pour ces trois derniers mois", a-t-il indiqué, avant de déplorer le "mutisme" des autorités locales, notamment le P/APW de Bouira. RAMDANE BOURAHLA