Contrairement à ses habitudes, Djamel Ould Abbes s'est astreint, lors de sa dernière activité partisane, à une stricte obligation... de silence. Jeudi, en début d'après-midi, au siège de son parti, le secrétaire général du FLN, Djamel Ould Abbes, a pris la parole devant une assistance assez nombreuse, pour honorer la mémoire de martyrs de la Révolution nationale. Les vies et les sacrifices de Yamina Oudaï (responsable de l'ALN dans la région de Cherchell, exécutée par l'armée française en octobre 1957), son mari Larbi Oudaï, son fils Lahbib, les 18 joueurs du Mouloudia de Cherchell et Abderrahmane Taleb, l'étudiant qui fabriquait les explosifs, sont racontés avec la dose d'émotion qui convenait à la circonstance. "Au FLN, nous avons entrepris, depuis un an et demi, de combattre la culture de l'oubli... Le peuple, qui ne connaît pas son histoire, n'a pas d'avenir", n'a cessé de répéter le premier responsable du Front. "Nous ne disons pas que le FLN a le monopole de l'histoire, mais il en fait partie. C'est une réalité indéniable, d'où la responsabilité qui lui incombe largement et particulièrement dans la transmission de ce legs révolutionnaire aux générations montantes", a-t-il poursuivi. La cérémonie est organisée un 24 mai. La date n'évoque aucun événement marquant de la lutte pour l'indépendance du pays. L'activité partisane devait-elle donner une tribune au patron du FLN, auteur, lors de sa dernière sortie publique, d'un dérapage verbal contre Amara Benyounès, président du MPA en l'occurrence ? Pas vraiment. Djamel Ould-Abbes, connu pourtant par sa promptitude à communiquer volontiers avec la presse, s'est abstenu de faire la moindre déclaration à portée politique. Mal à l'aise, il s'est cantonné dans des propos banals, qui ne pouvaient nullement le compromettre... encore une fois. "Ce Ramadhan se passe mieux que les précédents", a-t-il commenté, avant de lâcher, presque malgré lui : "Le comité central se réunira après le mois de Ramadhan, le temps de finir la rédaction des différents rapports... Les agitateurs se sont calmés." Il a esquivé les questions en acceptant de se prendre en selfies avec des militants. "Il ne peut pas parler", nous dira un de ses collaborateurs en aparté. Le SG du FLN a-t-il reçu instruction de ne plus alimenter le débat politique par des propos intempestifs et des projections sur la candidature potentielle du chef de l'Etat en exercice à la présidentielle de 2019 ? Probablement. Contrairement à ses habitudes, il a adopté, ce jeudi, une attitude sobre et réservée. Il a évoqué le président Bouteflika une seule fois, au moment où il recevait, en son nom, un portrait réalisé à base de mosaïques, offert par les élus du FLN dans la wilaya de Tipasa. "Nous sommes ciblés, mais nous avons une armée forte" ; "Nous vivons la stabilité, grâce au président Bouteflika", a-t-il lancé par saccade. Un militant a pris le relais pour assurer l'incontournable encensement dû au premier magistrat du pays. Certes, Djamel Ould Abbes parlait beaucoup du 5e mandat, prenait des initiatives, parfois surprenantes et assurément prématurées. En avril dernier, il mit en place une coordination estudiantine de soutien à pérennisation d'Abdelaziz Bouteflika au Palais d'El-Mouradia. Moins d'un mois après, le chef de l'Etat, dans un message diffusé à l'occasion de la célébration de la Journée nationale de l'étudiant, a incité à préserver l'école et l'université de l'instrumentalisation à des fins politiques ou idéologiques. Elles ne "sont ni un terrain de conflits ni un espace d'intérêts, d'idéologies ou de compétition politique", a-t-il affirmé. Camouflet pour Djamel Ould Abbes, qui a visiblement mal servi la cause. Il fissurait, en outre, l'alliance présidentielle par ses attaques contre ses partenaires politiques traditionnels, Ahmed Ouyahia autant qu'Amara Benyounès et, dans une mesure plus discrète, Amar Ghoul. "Le FLN n'a pas d'ennemis. Celui qui aime le pays rejoint le parti." C'est par ces propos sibyllins, quelque peu conciliateurs, qu'il a clôturé la cérémonie d'hommage aux martyrs de la guerre d'Algérie. Souhila H.