Le projet de loi organique fixant les règles de cette institution sera transmis à l'APN dès aujourd'hui jeudi. On en sait un peu plus sur l'académie de langue amazighe, notamment sur sa composante, après l'adoption par le Conseil des ministres de l'avant-projet de loi y afférent. Dans le communiqué du Conseil des ministres, tenu mardi en fin de journée, il est précisé que la future académie "est chargée notamment de recueillir le corpus national de la langue amazighe dans toutes ses variétés linguistiques, d'établir la normalisation de la langue amazighe à tous les niveaux de description et d'analyse linguistique et d'élaborer un dictionnaire référentiel de la langue amazighe". "La composition de l'académie est fixée à 50 membres au plus, choisis parmi les experts et compétences avérés dans les domaines des sciences du langage et en rapport avec la langue amazighe et les sciences connexes", ajoute encore le communiqué du Conseil des ministres. En attendant de découvrir le contenu de l'avant-projet de loi, les militants de la cause amazighe et les scientifiques préfèrent temporiser. "Je ne peux rien avancer pour l'instant. Il faut donc attendre la promulgation du texte pour prendre une position définitive. Cependant, vu l'importance d'une telle décision, on aurait souhaité que cette loi organique soit l'émanation d'un débat public", a ainsi indiqué le linguiste Mouloud Lounaouci, contacté hier. "Je crains par contre que les considérations idéologiques ne prennent le pas sur l'aspect scientifique", ajoutera le militant. L'avis de Lounaouci est partagé par l'écrivain et éditeur en tamazight, Brahim Tazaghart, qui, contacté, dit préférer "attendre de lire la loi" pour se prononcer. En revanche, Djamel Zenati ne veut pas être négatif. "La création de l'académie de langue amazighe est un acquis indéniable", a indiqué le militant. Mais pour notre interlocuteur, la question est avant tout politique. "Il y a beaucoup d'acquis, comme les libertés, mais cela n'a pas de traduction sur le terrain", estime Zenati qui rappelle que la loi protège les libertés, mais "cela n'empêche pas le pouvoir d'arrêter des manifestants et de museler les libertés". Pour promouvoir tamazight, au même titre d'ailleurs que "tous les acquis", il faut "l'existence d'un Etat de droit". "On peut reconnaître ce qu'on veut. Mais s'il n'y a pas d'Etat de droit, il n'y a rien", a tempéré l'ancien détenu d'Avril 1980. Le secrétaire général du Haut-Commissariat à l'amazighité ne partage pas ces craintes. Il estime qu'il ne faut pas faire "dans l'anticipation". "Les choses avancent" et la création de l'académie est "une décision historique dans le processus de réhabilitation de la langue amazighe", estime Si El-Hachemi Assad. Mais "il faut rappeler que cette académie ne vient pas ex nihilo. C'est la poursuite du travail que fait le HCA", a-t-il encore ajouté, tout en estimant que "les compétences existent" pour doter la future académie d'un encadrement de qualité. Interrogé sur le sort de la production qui existe actuellement, le secrétaire général du HCA croit qu'on "ne peut pas jeter tout ce travail" sans le valoriser. Le projet de loi organique portant création de l'académie de langue amazighe sera soumis aux députés. Mais il ne sera probablement pas à l'ordre du jour avant la rentrée parlementaire, prévue en septembre. Ali Boukhlef