Douze cadres des services de l'urbanisme et du foncier d'Alger ont été placés sous mandat de dépôt, avant-hier, après plus de huit heures d'auditions menées par le juge de la neuvième chambre du pôle pénal spécialisé du tribunal de Sidi M'hamed. Vent de panique dans l'entourage de l'importateur et promoteur immobilier Kamel Chikhi. L'exploitation graduelle des enregistrements vidéo, des données récupérées dans les ordinateurs et des communications téléphoniques par les experts de l'Institut national de criminologie permet chaque jour d'identifier de nouvelles personnes impliquées dans ce réseau de corruption révélé en marge de l'instruction autour des 701 kg de cocaïne saisis le 29 mai dernier au port d'Oran. Ce matériel récupéré par les services de sécurité, lors des perquisitions opérées au niveau des entreprises et dépôts de l'homme d'affaires, contient des enregistrements s'étalant sur une année et demie, apprend-on de sources judiciaires. C'est ainsi qu'au bout de plus de huit heures d'auditions menées par le juge de la neuvième chambre du pole pénal spécialisé du tribunal de Sidi M'hamed, 12 cadres des services de l'urbanisme et du foncier d'Alger ont été mis sous mandat de dépôt, avant-hier en fin d'après-midi. Il s'agit d'un architecte de la Direction de l'urbanisme d'Alger, d'un cadre de la Conservation foncière de Bouzaréah, de deux contrôleurs de la Conservation foncière d'Hussein-Dey et des chefs de service de l'urbanisme de plusieurs communes d'Alger, dont Kouba, Aïn Benian, Hydra, Chéraga et Draria. D'autres personnes citées durant ces interrogatoires seront présentées jeudi ou vendredi prochains devant la justice. Ces inculpations entrent dans le cadre de l'instruction en cours pour corruption, abus de fonction et d'indus avantages liés aux activités immobilières de Kamel Chikhi. Les prévenus auraient aidé ce dernier à contourner et même à violer la loi pour acquérir des assiettes foncières et des autorisations d'extension d'une vingtaine de projets immobiliers dans la capitale. Certains sont toujours en cours et d'autres achevés. Jeudi dernier, six autres prévenus, en l'occurrence le fils d'un ancien wali de Relizane, le fils de l'ex-Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, l'ancien président de l'APC de Ben Aknoun, le procureur du tribunal de Boudouaou et son adjoint, ainsi qu'un chauffeur du parc automobile de la DGSN ont été placés en détention, après une confrontation devant le juge, avec le promoteur immobilier. Deux magistrats ont été placés sous contrôle judiciaire. Cela étant, la question qui reste posée est de savoir pourquoi Kamel Chikhi enregistrait et filmait systématiquement ses conversations avec ses complices dans la justice, les conservations foncières, l'urbanisme et l'administration locale ? Voulait-il les utiliser comme arme de chantage ? Pour l'instant, les investigations en cours de la justice n'ont pas répondu avec précision à ces interrogations qui pourraient nous édifier davantage sur ce dossier. Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, qui a animé une conférence de presse lundi dernier, en marge des travaux de l'APN, ne nous a pas, non plus, éclairés sur l'instruction judiciaire autour d'une suspicion de blanchiment d'argent, à travers les projets immobiliers lancés par Kamel Chikhi dans la capitale. Pourquoi a-t-il fallu la saisie de la drogue dure pour révéler l'existence de cette enquête judiciaire, pourtant en cours depuis déjà de nombreux mois ? Nissa H.