Ce prénom féminin d'origine berbère nous vient du Moyen Âge. Le nom de Tiski doit être rapproché du touareg nigérien teske "bienfait". Il figurait sous une forme masculine dans l'onomastique berbère antique : YSK et YSKTN, qui devaient se lire yeska (il a fait un bienfait) et yeska-ten (il leur a fait un bienfait), noms laudatifs bien connus en berbère. Dans son Histoire des Berbères, Ibn Khaldoun nous apprend que l'ancêtre de la confédération tribale berbère des Huwwara, auxquels les Touareg sont traditionnellement apparentés par les généalogistes musulmans, s'appelait Tiski la boiteuse (Ibn Khaldoun, II, 273). Or on a comparé ces données d'Ibn Khaldoun avec le squelette de Tin Hinan, la reine mythique des Touareg qui, n'oublions pas, font partie des Huwwara. L'étude du squelette a révélé qu'il s'agissait d'une femme d'une stature assez élevée et qu'elle souffrait de lésions de lombarthrose sur le côté droit, avec des déformations au niveau des vertèbres lombaires et du sacrum, ce qui fait qu'elle devait boiter, tout comme cette Tiski. Selon la légende, Tin Hinan arriva, à une période ancienne, au Hoggar, qui était alors peuplé d'une population primitive, appelée Isbaten. Tin Hinan leur livra la guerre et réussit à les soumettre. Elle se maria – la tradition ne dit pas avec qui – et eut trois filles auxquelles elle donna des noms d'animaux : Tenert (l'antilope), Temerwelt (la hase) et Tahenkodh (la gazelle), desquelles devaient sortir les tribus suzeraines de l'Ahaggar. Selon une autre version, Tin Hinan n'eut qu'une fille, Kella, mère de toutes les tribus nobles. Takama, la servante, elle, engendra deux filles, ancêtres des clans tributaires. Si le nom de la reine de l'Ahaggar, qui signifie "celle des campements", est aujourd'hui répandu parmi les berbérophones des régions du Nord, notamment les Kabyles, il est frappé d'interdiction chez les Touareg. Ceux-ci le vénèrent à tel point qu'ils considèrent que l'ancêtre doit être la seule à le porter et, pour ne pas l'offenser, ils évitent même de le prononcer. Le verbe dont il est issu, han (se déplacer, changer de campement), a même été remplacé, dans le parler de l'Ahaggar, par un autre verbe de même sens, djelet. Mais malgré toutes ces interdictions, le nom est resté vivant dans toutes les mémoires, puisqu'il nous est parvenu. Les deux personnages, Tiski et Tin Hinan, ne font peut-être qu'un. Tin Hinan n'est sans doute que le sobriquet et non le nom de la reine de l'Ahaggar. M. A. Haddadou [email protected]