À l'initiative du Collectif des étudiantes libres de Bouira, une conférence-débat a été organisée, hier, à la maison de jeunes Mohamed-Issiakhem, autour du statut de la femme dans la société algérienne. Dans ce sens, Mme Aouicha Bakhti, militante féministe, a appelé, encore une fois, les pouvoirs publics à abroger le code de la famille, considérant que c'est un outil d'"humiliation et de soumission" des femmes. Selon l'intervenante, ce code est discriminatoire envers la femme et fait d'elle une mineure à vie. "Je ne vois pas pourquoi nous devons nous soumettre à un texte (le Coran, ndlr) qui a été établi il y a plus de 15 siècles ?", s'est-elle interrogée. Une position qui pourrait faire bondir les esprits les plus puritains, mais qu'assume pleinement Mme Bakhti. "Je ne vois pas en quoi cela dérangerait le bon Dieu que les femmes et les hommes soient égaux en droits et devoirs ? D'ailleurs, la religion musulmane prône l'égalité entre les êtres humains, sans aucune distinction de sexe ou de race", a-t-elle soutenu. De ce fait, elle considère ce texte juridique, en grande partie inspiré du Coran, comme un "instrument de domination et d'injustice" envers les femmes. Devant une assistance acquise à sa cause, Mme Bakhti tiendra à souligner que sa position et son discours n'ont rien d'anti-religieux. "Je respecte toutes les religions, mais je hais et je combattrai l'obscurantisme religieux, surtout celui qui condamne les femmes à être des citoyennes de seconde zone", assène-t-elle. De son côté, Ali Douidi, journaliste et écrivain, a souligné lors de cette rencontre l'aspect "égalitaire" entre les femmes et les hommes, tout en faisant remarquer que dans certaines sociétés arabes, la femme est encore "sous domination" masculine. Pour lui, le problème ne réside pas dans le Coran ou la religion, mais dans l'interprétation des textes. "Il faudrait une profonde réflexion autour du code de la famille pour mettre un terme aux tourments des femmes", dit-il. Lors des débats, des militantes pour l'amélioration de la condition féminine ont, quelque peu, critiqué le terme de "féministes" selon sa conception occidentale. "On ne se considère pas comme étant des féministes extrémistes, mais plutôt des défenseuses des droits des femmes", dira Amel Haddad, membre du Collectif des femmes libres d'Alger. Pour d'autres femmes, essentiellement des étudiantes, la société algérienne reste fondamentalement patriarcale dans son mode de fonctionnement. "Pourquoi un frère aurait-il automatiquement plus de droits et d'estime que sa sœur ? C'est cette forme d'injustice sociale que nous sommes résolues à combattre", soulignera Mlle Haddad. Selon elle, le code de la famille, qu'elle a qualifié d'infamie, encourage cette injustice sociale. Enfin, Mme Aouicha Bakhti indiquera que son combat et celui de ses camarades sont ceux de toute une société, tout en invitant toutes les composantes de la société à s'impliquer dans cette lutte, qui vise à placer l'Algérie dans le XXIe siècle. R. B.