L'échec de l'initiative française pour résoudre la crise libyenne était presque prévisible en raison de la complexité de la situation à Tripoli et des ingérences d'autres pays. Un nouveau sommet sur la Libye aura lieu les 12 et 13 novembre à Palerme (Sicile), sur initiative italienne, impliquant la Russie qui aura comme mission vraisemblablement de convaincre le controversé maréchal Khalifa Haftar d'y prendre part, ont rapporté les médias locaux. L'annonce a été faite mardi soir par le ministre italien des Affaires étrangères Enzo Moavero Milanesi, dont le pays n'a pas apprécié le "forcing" de la France de s'impliquer diplomatiquement de manière assez agressive en Libye, considérée par Rome comme pré carré italien, ce pays étant une ancienne colonie italienne. Au-delà du tort qu'ont causé toutes les initiatives lancées pour sortir la Libye de la crise, la rivalité franco-italienne a éclaté au grand jour, jetant le froid entre les deux pays, au moment où les parties libyennes continuaient à se livrer une guerre sans merci à Tripoli et dans les autres régions du pays. Cette fois-ci encore, Rome va tenter de rassembler les différents acteurs libyens autour d'une même table, en prenant toutefois le soin d'inviter plusieurs pays, dont les voisins de la Libye, mais aussi des Etats très impliqués de manière directe ou indirecte dans l'aggravation de la crise, comme les Emirats arabes unis, le Qatar, la Turquie, les Etats-Unis et la Jordanie. L'Union européenne, l'Union africaine et la Ligue arabe sont aussi conviées à cette conférence qui, officiellement, a pour objectif d'"identifier les étapes d'un processus de stabilisation" de la Libye, en prônant une "approche inclusive", a affirmé Enzo Moavero Milanesi, soulignant avoir reçu "une confirmation d'intérêt" de la part du maréchal Haftar pour participer éventuellement à la rencontre de Palerme. "Aucune date-butoir ne sera imposée aux Libyens", a expliqué le ministre italien, avant sa rencontre prévue lundi à Moscou avec son homologue russe Sergueï Lavrov. Lors de cette rencontre, la question de la participation de Khalifa Haftar sera l'une des priorités du ministre italien, à croire les médias italiens qui évoquent une implication directe de la Russie pour convaincre le maréchal libyen de se rendre en Sicile. Même si les chancelleries dénient à Haftar un quelconque rôle institutionnel officiel en Libye, elles lui reconnaissent toutefois un rôle clé dans la sortie de crise que les Libyens attendent impatiemment depuis la chute de l'ancien régime du défunt colonel Mouammar Kadhafi. Ce qui ressort de cette intense activité diplomatique autour du dossier libyen, c'est cette volonté de Rome de reprendre les choses en main, après avoir prédit l'échec de l'initiative française visant à organiser des élections générale en Libye avant la fin de l'année en cours, alors que la réalité du terrain disait le contraire. D'autre part, Moscou semble jouer un rôle de plus en plus prépondérant en Libye, surtout depuis la visite effectuée il y a quelques mois par M. Haftar à Moscou, où il avait été reçu par Vladimir Poutine lui-même. Si l'installation d'une base militaire russe dans l'Est libyen demeure toujours au stade de la rumeur, il devient clair aujourd'hui que Moscou ne compte pas jouer les seconds rôles en Libye, parallèlement au retour d'intérêt affiché par les Etats-Unis depuis l'arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche. Ainsi, après avoir été écartée en Syrie, la France prendra-t-elle ses distances et ne plus encombrer son voisin italien en Libye, en prenant le risque laisser la place à Washington et à Moscou ? Ce qui est certain, c'est que toutes ces ingérences sont en grande partie à l'origine des blocages actuels en Libye et ce sont les Libyens qui en paient le prix. Lyès Menacer