Selon la FIFA, seules la CNRL ou la commission de discipline peuvent prononcer une sanction d'interdiction de recrutement, après étude des dossiers des plaignants. Cependant, le bureau fédéral de la FAF continue de se substituer aux organes juridictionnels de la fédération. En marge du tirage au sort de la Coupe d'Algérie, le président de la LFP, Abdelkrim Medouar, a révélé que 19 clubs sont concernés par l'interdiction de recrutement à l'occasion du prochain mercato d'hiver, sans pour autant dévoiler l'identité de ces équipes. Autrement dit, ces 19 clubs ne pourront pas qualifier leurs prochaines recrues éventuelles, s'ils ne règlent pas leurs dettes auprès de la CNRL (Chambre nationale de résolution des litiges) d'ici la fin de la période des transferts, fixée du 16 décembre au 15 janvier 2019. Parmi ces 19 clubs, 10 sont issus de la Ligue 1 et 9 de la Ligue 2, a précisé Medouar. Cependant, à moins d'une semaine du début officiel du mercato, la LFP aurait dû rendre publique carrément la liste des clubs susceptibles d'être interdits de recrutement. Beaucoup de clubs traînant des litiges avec d'anciens joueurs se retrouvent en position de débiteurs à la CNRL, mais continuent tout de même de faire signer de nouveaux joueurs. Certains d'entre eux, s'ils ne règlent pas ces contentieux avant la date de la clôture du mercato, soit le 15 janvier, risquent de se voir refuser la délivrance de nouvelles licences. Le championnat national a connu du reste une pareille situation ubuesque lors du coup d'envoi de la compétition avec des clubs comme le CRB, l'USMH, le RCK… Pour éviter un tel scénario, la FAF et la LFP gagneraient donc à rendre publique dès maintenant cette fameuse liste en toute transparence. Cela permettra, d'une part, aux clubs concernés d'avoir le temps de parer au plus vite ou tout au moins de négocier des arrangements à l'amiable avec leurs ex-joueurs ; d'autre part, cet effort de communication évitera également aux joueurs de signer dans des clubs où ils ne seront pas qualifiés, risquant du coup de se retrouver au chômage à la fin du mercato. Le souci de transparence doit permettre également de ne pas laisser la place aux spéculations accusant parfois la fédération de faire dans les deux poids, deux mesures dans le traitement des dossiers de la CNRL. L'interdiction de recrutement n'est que le début de la procédure disciplinaire Tout le monde a en mémoire, en effet, comment le club de l'USM Annaba a disparu en début de saison de la liste des clubs interdits de recrutement sur décision du président de la FAF, Kheirreddine Zetchi, alors que la CNRL avait déjà statué dans cette affaire. En dépit d'une décision de la commission de discipline, précédée d'une autre de la CNRL, obligeant le club annabi à payer rubis sur l'ongle sa dette de près de 10 milliards dans un délai de 15 jours, Zetchi est intervenu pour prolonger ce délai jusqu'à la fin de la saison. Ce qu'il n'a pas fait avec les autres clubs. Par ailleurs, la sanction de l'interdiction de recrutement doit être prononcée par la commission de discipline de la LFP ou la CNRL. Or, au sein de la FAF, elle émane du bureau fédéral qui ne peut en aucun cas jouer le rôle d'organe juridictionnel de la fédération. La dernière circulaire de la FIFA est claire à ce sujet. Cette circulaire explique justement la procédure à suivre pour un joueur ou un entraîneur pour saisir la CNRL, en cas de non-payement de salaires (deux salaires mensuels aux dates prévues au minimum). Le bureau fédéral de la FAF avait décidé que les clubs endettés vis-à-vis des joueurs ou des entraîneurs qui ont saisi la CNRL seront interdits de recrutement. Cependant, les membres du BF ont exclu de cette interdiction les clubs ayant cumulé un montant de dettes inférieur ou égal à un milliard de centimes. "Le seuil de l'interdiction de recrutement durant le mercato pour les clubs endettés envers des joueurs et/ou des entraîneurs a été porté à 10 millions de dinars. Les clubs dont le montant des dettes est supérieur à cette somme seront interdits de recrutement", avait annoncé la FAF. Enfin, il faut noter que la décision d'interdiction de recrutement infligée aux clubs n'est pas une fin en soi. Ce n'est que le début d'une procédure disciplinaire qui peut aboutir jusqu'à la relégation du club en division inférieure. En fait, si le club débiteur n'honore pas ses obligations financières après la fin et l'épuisement du délai réglementaire, le créancier peut saisir la FAF pour exécuter la décision en question (article 64 alinéa 6 code disciplinaire FIFA). Du coup, la FAF transmet le dossier immédiatement à la commission de discipline compétente pour prononcer d'autres sanctions. L'article 91 du code disciplinaire de la FAF prévoit qu'en "cas de non-paiement ou de non-respect de la décision malgré le dernier délai de grâce accordé, une interdiction de recrutement de joueurs est prononcée. Si le club ne respecte pas ce dernier délai, la fédération et/ou la ligue concernée sera tenue d'appliquer les sanctions prononcées. La déduction de points portera sur trois paliers (3 points, 6 points et 9 points) en fonction du montant dû. Une suspension de toute activité relative au football peut par ailleurs être prononcée contre toute personne physique (dirigeants, joueurs, entraîneur)". C'est dire que les clubs qui seront interdits de recrutement lors du prochain mercato doivent s'attendre à d'autres sanctions, à moins que la FAF ne décide de s'arrêter là, ce qui est contraire aux orientations de la FIFA énumérées dans la dernière circulaire n°16-28 du 9 mai 2018. SAMIR LAMARI