Au bout d'un quart d'heure, l'esplanade de la maison de la culture était noire de monde. Les rues de la wilaya de Béjaïa continuent à exprimer leur rejet du cinquième mandat de Bouteflika et du système en général. En effet, des dizaines de milliers de personnes, 200 000 selon les organisateurs, ont investi la rue, hier, à Béjaïa, pour dire : "Non au 5e mandat de Bouteflika et système dégage !" Il était 13h lorsque les premières grappes de manifestants avec des brassards rouges, commençaient à affluer vers l'esplanade de la maison de la culture Taous-Amrouche de Béjaïa, point de départ de la manifestation populaire anti-5e mandat et antisystème. Au bout d'un quart d'heure, l'esplanade était noire de monde. Des manifestants de tous âges avec une prédominance de jeunes, continuent à converger vers le point de départ et l'esplanade s'avère trop exiguë pour contenir ces milliers de personnes déjà sur place. Ces manifestants scandent à tue-tête des slogans hostiles au pouvoir. "Bouteflika ya Lmaroki, makenche ouhda khamissa", "Système berra", "Mazalagh d'Imazighen", sont autant de slogans repris à pleins poumons par les manifestants. Le militant associatif et membre du comité pour la libération de Merzoug Touati, Yanis Adjlia, à l'aide d'un mégaphone, rappelle aux manifestants que "la marche est pacifique et contre le cinquième mandat de Bouteflika et le système". À 14h, la marée humaine s'est ébranlée en direction du siège de la wilaya dans une organisation impeccable. Aucun incident n'a émaillé la marche. La police est restée à l'écart. Tout au long de l'itinéraire de la marche, les manifestants ont scandé des slogans hostiles au pouvoir et au système. "Pouvoir assassin", "Pas de 5e mandat", "Système dégage !", "Y en a marre de ce pouvoir", sont les mots d'ordre qui ont rythmé la marche. Alors que les premiers marcheurs étaient déjà arrivés au rond-point de Daouadji, les derniers n'avaient pas encore démarré. Les deux voies sont envahies de marcheurs. C'est dire la déferlante citoyenne contre le 5e mandat. Devant le siège de la wilaya, le collectif d'organisateurs monte sur le toit de la loge d'entrée principale pour s'adresser aux manifestants. Le collectif, il faut le souligner, ne manquait pas d'imagination, puisqu'il a hissé, sur ce toit, un fauteuil roulant sur lequel est assis un jeune "sous perfusion", et ce, pour caricaturer l'image du chef de l'Etat malade, Abdelaziz Bouteflika. Le jeune, avec sa main tremblante et sa tête inclinée, salue le public en lui envoyant des bises. Et à la foule de scander en chœur : "Un handicapé hakem", "Pouvoir assassin" et autres slogans hostiles au pouvoir. Dans son intervention, Yanis Adjlia a souligné et salué "la forte mobilisation citoyenne à cette marche historique et la maturité et le civisme des manifestants". "Aujourd'hui, notre message est clair. À travers cette grandiose marche, nous disons non au cinquième mandat de Bouteflika et au système dégage !", a-t-il déclaré avant d'appeler à observer une minute de silence à la mémoire des martyrs de la Révolution et du Printemps noir. L'intervenant appelle les forces progressistes à s'unir car "l'Algérie est notre point de convergence". Puis il "a salué la mobilisation des autres wilayas". Vers 16h, la marche a pris fin et les manifestants se sont dispersés dans le calme en administrant au pouvoir, en cette journée du 22 février, une leçon de maturité et de courage. Une leçon qui consiste à lui dire : "Nous aussi nous savons maîtriser la rue sans violence." Le pouvoir saisira-t-il le message de toutes ces marches au niveau national ? La veille, deux marches similaires avaient eu lieu à Tichy et à Amizour. L. OUBIRA