Les Etats-Unis sont mis au pied du mur par l'attitude intransigeante des dirigeants nord-coréens. Peuvent-ils se permettre de s'attaquer à ce pays et à l'Irak en même temps ? Au moment où la maison-blanche apportait les dernières retouches aux préparatifs d'une guerre annoncée contre Bagdad, la Corée du nord, que George Bush avait classée dans “l'axe du mal”, vient perturber toute la stratégie américaine. La provocation de Pyongyang est qualifiée de véritable offense à l'administration US, dont la nouvelle géostratégie, prévoyant des attaques préventives contre les pays qui menaceraient les Etats-Unis et leurs alliés avec des armes de destruction massive, est mise sérieusement à l'épreuve. En effet, Kim Jong Il, le président nord-coréen, non satisfait de la réactivation de ses centrales nucléaires, se retire du traité de non-prolifération nucléaire (TNP), auquel adhère l'ensemble des pays de la planète, à l'exception d'Israël, de l'Inde et du Pakistan. Cette dernière décision constitue une étape supplémentaire dans le défi de Pyongyang à Washington, qui avait pourtant fait preuve de retenue dans sa réaction en invitant le voisin Séoul à raisonner “son frère ennemi”, pour éviter une guerre nucléaire dans la région. Provoquée par la décision américaine de suspendre les livraisons de fioul à la Corée du Nord, la crise atteint son summum après la menace de sanctions économiques brandie par Bush, que Kim Jong Il a qualifiée de déclaration de guerre vis-à-vis de son pays. Absorbés par le conflit irakien, les Etats-Unis sont désormais acculés. Peuvent-ils ouvrir un second front, même si leurs moyens militaires le permettent, pour faire rentrer dans les rangs cet inattendu contestataire ? Rien ne semble l'indiquer pour l'instant. C'est la diplomatie qui est privilégiée par le locataire du bureau ovale, dont la priorité semble aller à la crise avec Saddam Hussein. Mais jusqu'à quel point George Walker Bush encaissera-t-il les offenses de la Corée du Nord, alors qu'il y a quelques mois à peine, il n'admettait aucune opposition à sa stratégie ? Une chose est sûre, ce nouveau front aura inévitablement des répercussions sur les décisions américaines contre l'Irak. La menace coréenne sauvera-t-elle Bagdad d'une attaque militaire alliée ? Peu probable, mais les Etats-Unis y réfléchiront à deux fois maintenant, avant de s'attaquer au régime irakien. Tout dépendra de l'évolution du bras de fer avec Pyongyang. Le retrait de la Corée du Nord du TNP fera l'objet, la semaine prochaine, d'une réunion du Conseil de sécurité. En attendant, Colin Powell a lancé vendredi dernier un nouvel appel aux dirigeants de Pyongyang pour qu'ils renoncent à leur “politique folle”. “J'espère que la direction nord-coréenne réalisera la folie de ses actions”, a-t-il déclaré. Powell n'a pas manqué de souligner que Washington “allait rester ouvert à la possibilité de discussions”. K. A.