En grève, pour certains, depuis le 22 février dernier, de nombreux étudiants ne lâchent pas prise. Ils disent, pour leur 9e mardi : "Nous préférons une année blanche plutôt qu'un avenir noir". "Je m'appelle Ania Larbi, j'ai 22 ans et je suis étudiante à Bab Ezzouar. Je suis une fille du hirak, et je n'aurai pas de répit tant que nous n'aurons pas avancé dans nos revendications". "Je m'appelle Mahmoud Hessak, je suis étudiant en droit et je continuerai à crier ma rage et réclamer une justice indépendante". Comme Ania et Mahmoud, ils étaient des dizaines de milliers à envahir, hier, l'esplanade de la Grande-Poste et les avenues avoisinantes. Des étudiants venus de toutes les universités d'Alger et de ses environs. Leur mobilisation pour un 9e mardi ne faiblit pas, malgré les tentatives de répression. "Nous n'avons pas peur, nous ne baisserons pas les bras et nous continuerons à manifester notre ras-le-bol de ce système qui nous pourrit la vie", nous ont déclaré des étudiants désignés chefs de file pour encadrer leurs camarades manifestants. Munis de mégaphones, les chefs de file scandaient des slogans révélateurs du degré de maturité de ces bourgeons appelés à devenir les cadres de la nation. "La politique a échoué et le gouvernement a trahi", peut-on lire sur les pancartes portées haut par des étudiants où était également inscrit : "Etudiants conscients demandent une nouvelle Constitution". Venus de l'Ecole supérieure des travaux publics de Kouba, de l'université de Bab Ezzouar (USTHB), de la Faculté centrale, de Bouzaréah, de l'Epau, de l'ISI, de Boudouaou, de Tipasa, de Dely Ibrahim, de Ben Aknoun et de bien d'autres instituts, ils criaient les mêmes mots d'ordre : "Non à Bensalah, non à Bedoui, non à la houkoumet el cocaïne", ou encore : "Nous ne voulons pas d'un diplôme non reconnu donné par un gouvernement corrompu", et par-dessus tout : "Des universités sans moyens, un pouvoir judiciaire sans justice, des hôpitaux sans médecins et à quand un gouvernement sans traîtres." Pour un changement de régime et une justice indépendante Depuis la Grande-Poste à la place Audin et plus haut encore en allant vers la rue Didouche-Mourad, les étudiants ont lancé un message au chef d'état-major de l'armée. "Aujourd'hui, notre message est clair et il est adressé à Gaïd Salah. Nous voulons un pays de droit et une justice indépendante. Pourquoi cibler certaines personnes plutôt que d'autres, et laisser les personnes qui sont vomies par tous les Algériens ?" nous disent des étudiants. Ils avertissent contre "les règlements de comptes". Dans les cortèges des manifestants, nous retrouvons Ania et Mahmoud. Ils sont venus chacun avec de nombreux autres camarades de l'université de Bab Ezzouar et de Boudouaou. Les slogans fusaient de toutes parts et appelaient à "l'union" et non à la "division". "Ya Gaïd, nkoloulek Bensalah machi raïs" (nous ne reconnaissons pas Bensalah en tant que président). Beaucoup d'autres pancartes et banderoles portaient des messages révélateurs du temps de réflexion pris par les étudiants au cours de leurs rencontres-débats pour préparer la manifestation du mardi. Mahmoud Hessak nous dit : "Nous ne voulons pas d'une justice opaque où les ordres se donnent par téléphone. Nous voulons une justice indépendante où tous ceux qui ont failli soient jugés de la même manière." Il poursuit : "Nous sommes l'avenir de ce pays et nous n'en voulons pas d'autre que lui." Ania n'en pense pas moins et insiste : "Y en a marre de ce gouvernement. Tout est sujet aux passe-droits et après 18 ans d'études, on touche à peine 30 000 DA. Y en a marre de la hogra (injustice). Cette mafia nous a détruits, elle a créé la haine et la zizanie entre un seul et même peuple. 20 ans barakat, ils n'ont pas pris leur responsabilité, yatnahaw ga3. Aujourd'hui, tout ce que nous voulons c'est qu'on nous rende notre Algérie."