Pour la quatrième fois consécutive, un impressionnant dispositif de sécurité, constitué d'escadrons antiémeutes de la Gendarmerie et de la Sûreté nationale, a été déployé dès jeudi à 13h pour empêcher les manifestants de rallier Alger pour signer l'acte X des marches pacifiques et revendiquer le départ du système. Au-delà du fait lui-même, à savoir empêcher les Algériens de marcher et sauver les résidus d'un système complètement fissuré, le blocage des voies de communication pour les citoyens, les transports des personnels et de marchandises, cela constitue une violation des droits fondamentaux prescrits par la Constitution dans un nouvel article introduit en 2016. En effet, il s'agit de l'article 55 qui stipule que "tout citoyen jouissant de ses droits civils et politiques a le droit de choisir librement le lieu de sa résidence et de circuler sur le territoire national". Cet article de loi protège le citoyen même au niveau des frontières, et ce, en lui garantissant "le droit d'entrée et de sortie du territoire national". Mieux encore, ces barrages érigés un jour ouvrable de la semaine, soit la veille de la marche, s'inscrivent en porte-à-faux avec la liberté de manifester sur la place publique. En ce sens, l'article 49, également introduit en 2016, stipule que "la liberté de manifestation pacifique est garantie au citoyen dans le cadre de la loi qui fixe les modalités de son exercice". Or, et contrairement aux trois derniers week-ends où les services de sécurité avaient empêché les Algériens de rallier la capitale, des témoignages ont fait état du refoulement de manifestants à Boudouaou et à Lakhdaria et de la confiscation du drapeau amazigh et de l'emblème national. Sur Facebook, un élu d'une commune de Tizi Ouzou a témoigné qu'il avait été refoulé par les gendarmes qui ont fermé l'accès à l'autoroute Est-Ouest et à Boudouaou. "On vient d'être refoulés violemment de l'autoroute au niveau du barrage de Boudouaou sur notre route vers Alger par la Gendarmerie nationale. Nous avons pris l'autoroute Tizi Ouzou-Alger comme d'habitude. Arrivés au niveau du barrage filtrant imposé à Boudouaou, ils nous ont repérés ; ils nous ont demandé de nous garer. Ils ont commencé à fouiller notre véhicule. Nous étions quatre jeunes et les seules armes qu'ils ont trouvées sont l'emblème national et le drapeau amazigh. Ils nous ont obligés à faire demi-tour. Voici la dictature militaire qui s'installe doucement", a écrit cet élu qui a, par ailleurs, dénoncé l'entrave à la libre circulation d'un Algérien en Algérie. Un avocat de Béjaïa, qui se rendait à Alger, a également été refoulé au niveau du tunnel de Lakhdaria, dans la wilaya de Bouira. "À l'instant, on vient d'être refoulés violemment de l'autoroute au niveau du tunnel de Lakhdaria sur notre route vers Alger par la gendarmerie. On a été interpellés et menottés, puis emmenés sous des insultes et des menaces. Notre drapeau national nous a été confisqué. Voici la dictature militaire qui s'installe doucement", a dénoncé cet avocat sur son compte Facebook. Les milliers de manifestants qui étaient bloqués, à l'instar de ceux qui ont été refoulés, se sont déchaînés sur la Toile et ont dénoncé ces barrages érigés aux entrées de la capitale. Ceux qui ont bifurqué vers El-Hamiz, Rouiba, Réghaïa ou encore vers Dar El-Beïda et Bab-Ezzouar ont garé leurs véhicules avant d'être pris en auto-stop sur La Moutonnière par les autres manifestants, très nombreux à se solidariser pour réussir le 10e vendredi antisystème.