Des barrages inhabituels des forces antiémeute de la gendarmerie, l'autoroute Est-Ouest complètement bloquée et des automobilistes qui peinent pour arriver à Alger… Le pouvoir ne divorce toujours pas avec ses anciennes pratiques pour entraver la marche du peuple. Il les renforce même. Hier, à l'occasion du 10e vendredi de mobilisation pour le départ du régime, il a placé la capitale, Alger, en état de siège. Tous les accès y menant sont bouclés, dans le but d'empêcher l'arrivée des milliers de manifestants venant des wilayas limitrophes. Le message est clair : les tenants du pouvoir ne veulent pas d'un raz-de-marée humain à Alger, qui disqualifierait définitivement leurs manœuvres. En effet, selon des témoins, les accès est, ouest et sud d'Alger étaient complètement fermés. Les forces antiémeute de la gendarmerie, selon eux, ont bloqué tous les accès et ont contraint des manifestants à rebrousser chemin. «Chacun manifeste dans sa wilaya», lancent les gendarmes à l'adresse des personnes qui s'apprêtaient à rejoindre la capitale. «On a été refoulés violemment d'Alger, notre capitale, on nous a dit d'aller marcher chez nous, notre drapeau national nous a été confisqué, on nous a fait descendre de la voiture de force, face à un dispositif impressionnant des forces antiémeute de la gendarmerie, ils nous ont violemment emmenés et plaqués contre leurs fourgons, fait écarter les jambes, sous des menaces, ils m'ont mis des menottes et forcé à faire demi-tour», raconte Saïd Salhi, vice-président de la LADDH, qui a mis plus de 8 heures pour arriver à Alger, en contournant tous les barrages placés sur l'autoroute Est-Ouest. Placés à l'entrée de Lakhdaria, les premiers barrages de la gendarmerie, dit-il, obligent les automobilistes soupçonnés d'avoir transporté des manifestants à faire demi-tour. «Ils nous ont dit : ‘‘Vous n'allez pas rejoindre Alger''. Ils ne m'ont retiré les menottes qu'après leur avoir dit que je suis vice-président de la LADDH et que je connais bien les procédures», déclare Saïd Salhi, que nous avons rencontré vers midi à Alger, en compagnie de ses deux amis, le directeur d'une école à Béjaïa et un enseignant dans la même wilaya. La fermeture des accès à la capitale a commencé jeudi soir, obligeant ainsi des usagers de la route à faire en plus de 3 heures des trajets de seulement 1h30. Cette pratique a pénalisé aussi des voyageurs qui devaient prendre des vols vers l'étranger au niveau de l'aéroport d'Alger et des malades qui devaient se rendre dans les hôpitaux de la capitale. «Méthodes de répression» Dans un communiqué rendu public, le RAJ dénonce le recours par le pouvoir aux méthodes de la répression. «Le pouvoir veut fermer les portes d'Alger aux Algériens, à travers le recours aux méthodes de la répression en fermant l'autoroute et en refoulant systématiquement toutes les personnes, usant même de l'insulte et de la confiscation des drapeaux algériens», dénonce l'association, expliquant que ces méthodes renseignent sur la volonté du régime autoritaire à confisquer la révolution populaire du 22 février. «RAJ dénonce cette attitude répressive et appelle à la vigilance pour déjouer les tentatives du régime machiavélique visant à deviser le mouvement et le neutraliser», lit-on dans ce document. Dans un communiqué signé par son premier secrétaire, Hakim Belhacel, le FFS condamne aussi «avec force, la volonté du régime agonisant algérien d'imposer l'état de siège dans la capitale algérienne». «Cette opération répressive, qui nous rappelle les pires années coloniales, vise à empêcher des centaines de milliers de nos concitoyennes et concitoyens venus de plusieurs wilayas du pays à manifester librement dans leur propre capitale», dénonce ce parti, précisant que «contrairement aux promesses mensongères du chef de l'état-major, le régime algérien en pleine faillite est en voie de s'engouffrer dans une stratégie d'embrigadement et de ghettoïsation du peuple algérien».