C'est demain que le soulèvement citoyen contre le système enregistrera sa 14e semaine de mobilisation et de contestation. Ce 14e vendredi est décisif. Il l'est d'autant plus que la réplique attendue de la rue déterminera, inéluctablement, la suite que prendra la mobilisation dans les jours à venir, compte-tenu de l'évolution de la situation. La rue est certainement contrainte de réaffirmer sa position vis-à-vis, notamment, du scrutin présidentiel que les tenants du pouvoir s'entêtent à maintenir dans ses délais de rigueur. Comme à l'accoutumée, le dialogue entre la rue et le pouvoir aura indirectement lieu. Les manifestants auront leur temps de parole et s'exprimeront demain. Le discours du chef d'état-major, les initiatives politiques lancées ici et là seront, entre autres, examinées par une rue qui n'a pas manqué, du moins jusque-là, de mettre à jour ses slogans et ses revendications. Le ton a été donné par la marche, avant-hier, des étudiants, qui ont exprimé leur rejet massif de la présidentielle. Cela dit, la mobilisation du vendredi ira, selon toute vraisemblance, dans le même sens et réaffirmera sans ambages son opposition à ce qu'elle a qualifié de rafistolage et de fuite en avant. La mobilisation, qui a su surmonter tous les obstacles et écueils depuis le 22 février, notamment celui du mois de Ramadhan, que d'aucuns ont pensé qu'il allait causer l'essoufflement du mouvement, a promis d'être encore plus forte et plus intense ce vendredi. Ni les barrages filtrants ni la contre-révolution sur les réseaux sociaux et encore moins la fermeture des lieux symboliques du soulèvement, la Grande-Poste à Alger et le "Palais du peuple" à BBA par exemple, ne sauraient affaiblir une mobilisation décidée à changer le régime de fond en comble. Le 14e vendredi de protestation citoyenne ne sera pas une simple halte qui permettra de mesurer l'étendue de la mobilisation. La rue a fait ses preuves et n'a pas à mesurer sa force. Les millions de citoyennes et de citoyens qui occupent les rues des villes aux quatre coins du pays sortiront encore ce vendredi pour rappeler, une fois de plus, qu'ils restent inflexibles face aux manœuvres dilatoires des résidus du système. L'exigence d'une solution politique à la crise que vit le pays depuis des mois, résultat inévitable de la non-gestion qui a caractérisé le long règne de ce système, ne peut être que réaffirmée et rappelée à l'occasion de la 14e manifestation citoyenne de ce vendredi. Cette solution politique que prône la rue, depuis trois mois de manifestations pacifiques, ne pourra se concrétiser sans le départ des hommes et autres symboles du système, notamment ceux restés accrochés aux leviers de la décision en vertu de l'application de l'article 102 de la Constitution. Le départ de Bensalah et de Bedoui, respectivement chef d'Etat intérimaire et Premier ministre, reste une revendication non encore satisfaite, même si les acquis arrachés jusque-là sont nombreux, à commencer par le départ de Bouteflika, le recul sur le 5e mandat, mais aussi la libération de la parole. Paisible, mais surtout mûre, la mobilisation citoyenne contre le système ne manquera pas de maintenir la pression sur un régime agonisant, mais surtout à révéler ses contradictions.