Les manifestants n'ont pas hésité à asséner que c'est le peuple qui a libéré l'armée et qu'il est du devoir de cette dernière de répondre à toutes ses requêtes dont le départ de tout le personnel politique hérité de l'ère Bouteflika. Inlassables, les Constantinois sont ressortis en masse pour le 14e vendredi consécutif pour exprimer leur ras-le-bol devant la persistance des résidus du clan ou plutôt du gang, comme ils aiment l'appeler. Cette fois-ci, ils ont répandu, presqu'unanimement, de véritables réquisitoires à l'endroit du chef d'état-major de l'armée, Ahmed Gaïd Salah, qu'ils accusent de tergiversations autour de la volonté populaire exprimée par des millions d'Algériens, celle d'en finir avec le système politique et ses figures. Ni le jeûne ni la chaleur n'ont, donc, empêché les marcheurs qui ont investi le centre-ville dès 14h brandissant, comme à l'accoutumée, emblème national, pancartes et banderoles, et entonnant des chants et des mots d'ordre aux antipodes des derniers discours de Gaïd Salah. Des manifestants qui n'hésitent plus à assener que c'est le peuple qui a libéré l'armée et qu'il est du devoir de cette dernière de répondre à toutes ses requêtes dont le départ de tout le personnel politique hérité de l'ère Bouteflika et le report sine die de l'élection présidentielle du 4 juillet prochain. Signe particulier d'un divorce consommé entre le peuple et le chef d'état-major de l'armée, l'absence totale du slogan repris lors des premières marches citoyennes, "Djeïch chaâb, khawa khawa", troqué contre "El-djeïch dialna oua el-Gaïd khan'na" ou encore "Gaïd Salah dégage" et "Gaïd Salah maâ el-îssaba". Ce dernier, qui n'a guère été ménagé par les manifestants, toutes obédiences confondues, semble devenir, au fil des semaines, une cible privilégiée des marcheurs tant il est vrai que le nom de Gaïd Salah est devenu plus fréquent dans les slogans et mots d'ordre brandis ou scandés. Autant dire que ce quatorzième vendredi a été d'un inconfort avéré pour le chef d'état-major de l'armée, Ahmed Gaïd Salah, puisque mis par les manifestants sur le banc des accusés et sommé par la voix du peuple de rendre son tablier. Même les défenseurs de l'option Ahmed Taleb Ibrahimi pour la direction d'une phase de transition se sont faits assez discrets lors de ce 14e acte des marches populaires du vendredi. Déçus, autant par les faux-fuyants du chef d'état-major de l'armée et son obstination d'aller vers une élection présidentielle dont l'organisation échoit au gouvernement Bedoui et qu'ils ont défendu en même temps que le choix de l'ex-ministre des Affaires étrangères sous Chadli que par le contenu de la dernière lettre d'Ahmed Taleb Ibrahimi, ils ont vraisemblablement manqué d'arguments pour étayer leur démarche face à l'hostilité manifestée par une génération de jeunes qui refuse de confier son destin à un autre grabataire. Kamel Ghimouze