Pour les locataires de la bâtisse n°1 bis rue, El-Fida, dans le quartier de la vieille ville de Annaba, une mort certaine peut survenir d'un moment à l'autre au vu de l'état de délabrement extrême dans lequel se trouve le bâtiment, qui penche dangereusement sur le côté, et l'on a peine à croire qu'il abrite 14 familles, soit 69 personnes. En effet, ce vieil immeuble de deux étages, qui date de l'époque coloniale, est à moitié effondré. La cage d'escalier, au bois vermoulu, n'est plus qu'un tas de planches retenues par de vieux madriers, ainsi que pour le plancher du deuxième étage. Dans les pièces, les fissures des murs laissent passer la lumière et il semble qu'il suffirait d'un rien pour que l'ensemble s'écroule sur ses locataires, tel un château de cartes. Interrogés, les habitants de cette “ruine” nous ont déclaré qu'ils avaient, durant des années, relancé l'Opgi, propriétaire de l'immeuble, pour procéder à la restauration des logements avant qu'il n'arrivent à cet état extrême, mais jamais rien n'a été fait. “Ils se sont bornés à afficher une pancarte portant l'inscription “immeuble à démolir”, mais ni la commune ni personne n'est venue nous prendre en charge, malgré les nombreuses visites des représentants des autorités concernées”, a déclaré un jeune homme portant un bébé dans ses bras. “Ma famille vit ici depuis 1963. je suis né ici, je suis aujourd'hui père de deux enfants et j'habite toujours cet immeuble.” Une vieille femme nous parle de sa fille “qui a fait une chute dans l'escalier en ruines en échappant de peu à la mort”. Les habitants de cet immeuble, qui se battent depuis plus de douze ans pour que l'Etat s'occupe de leur situation, ont gagné trois procès contre l'Opgi, sommé par le passé de procéder aux travaux de réhabilitation de l'immeuble, en vain. “Nous n'avons pas où aller avec nos familles, alors, nous attendons que l'immeuble s'écroule et devienne notre tombe”, a déclaré une femme qui attend un bébé. Questionné sur cette situation des plus préoccupantes, le directeur de l'Ocrawa (Office communal de réhabilitation et de réaménagement de la wilaya de Annaba), M. Khélifa, nous a déclaré : “Cet immeuble, qui représente une vraie menace pour la vie de ces citoyens, était l'objet de nombreux rapports que son service a adressés aux pouvoirs publics concernés, sans qu'aucune réaction n'ait été constatée, laissant ces habitants à leur sort”. De plus, ce fonctionnaire a déclaré que cet immeuble faisait d'un ensemble de 58 logements, recensés par ses services au niveau de la vieille ville, menacés d'effondrement imminent, mais toujours occupés par leurs locataires qui n'ont pas où aller. Par ailleurs, une commission composée du chef de la daïra, de la directrice de l'action sociale, du directeur de l'Opgi et d'un représentant de la protection civile, s'était rendue récemment sur les lieux pour faire le constat visuel de la situation, particulièrement celle de la rue El-Fida. “Mais nous attendons toujours les résultats”, devait commenter le responsable de l'Ocrawa, qui a saisi l'occasion de notre visite pour tirer une fois de plus la sonnette d'alarme quant au danger encouru par ces familles, en ajoutant : “Je préfère encore les voir dans la rue !” Hafiza M.