Des dizaines de citoyens de la commune de Haïzer (Bouira) ont organisé, hier, une autre marche au niveau du chef-lieu de la wilaya, afin de réclamer la libération "immédiate et inconditionnelle" de l'ensemble des détenus accusés d'"atteinte à l'unité nationale" pour avoir brandi l'emblème de Tamazgha lors des deux derniers vendredis. Les protestataires, munis de banderoles et autres pancartes où il était inscrit, entre autres, "Libérez la justice", "Justice criminelle" et "Nul ne peut arrêter le peuple sur le chemin de son destin", ont sillonné les différentes artères de la ville en scandant des slogans hostiles au pouvoir en place incarné par le chef d'état-major, Ahmed Gaïd Salah. "Nous sommes en train de basculer lentement mais sûrement vers une véritable dictature à la Pinochet", s'alarmera un manifestant. Et d'ajouter : "Ces arrestations traduisent clairement la volonté du pouvoir de museler toute voix qui peut s'opposer à ses desseins et à sa volonté de se maintenir coûte que coûte." Pour Nabil Bennaï, un des initiateurs de cette marche, Gaïd Salah, à travers ses discours hebdomadaires, "donne des instructions en filigrane" aux juges pour appliquer sa volonté. Selon notre interlocuteur, la mise sous mandat de dépôt de Lakhdar Bouregâa est une preuve de plus que la justice, selon ses dires, est à "la botte du général Gaïd Salah". "Nous restons mobilisés jusqu'à la libération de l'ensemble des détenus car, vis-à-vis de la loi, ils n'ont absolument rien fait de mal, si ce n'est brandir un drapeau qui symbolise notre culture et notre identité", a-t-il argué. 10h15, il y avait foule à proximité du siège de la cour de justice, lieu du rassemblement. Des protestataires, l'emblème national et celui de Tamazgha en main, ont, encore une fois, protesté contre ce qu'ils ont qualifié de "justice aux ordres". "La justice n'est pas encore libre et l'incarcération de nos jeunes en est la preuve éclatante", soulignera un manifestant. Pour d'autres, la détention "arbitraire" des 42 manifestants lors des marches des deux derniers vendredis à Alger signifie que le pouvoir actuel voudrait, selon eux, diviser le pays en jouant sur la fibre régionaliste. Les manifestants ont ensuite adressé un message clair aux magistrats, précisément ceux du tribunal de Sidi M'hamed : "Restez fidèles à votre serment fait au peuple au lendemain de la révolte du 22 février, soyez à la hauteur de votre noble fonction et ne jetez pas des innocents en prison : l'Historie vous jugera !" Le P/APC de Haïzer, qui a pris part à l'action d'hier, a fait savoir que d'autres actions sont en préparation jusqu'à la libération de tous les jeunes. "Nous n'allons pas nous taire face à ces pratiques et toute une région est mobilisée pour libérer les détenus", a-t-il soutenu. Par ailleurs, les avocats de la wilaya de Bouira ont organisé une rencontre à l'université Akli-Mohand-Oulhadj, durant laquelle ils ont abordé la situation politique du pays. Ainsi, les représentants de la défense de la wilaya ont unanimement condamné la vague d'arrestations et d'incarcérations pour cause de port du drapeau amazigh. "Nous condamnons fermement ces agissements contraires à la loi et exigeons la libération immédiate de l'ensemble des détenus d'opinon", a souligné la bâtonnière de Bouira, Mme Sidhoum. En outre, les robes noires ont, une nouvelle fois, appelé le gouvernement de Bedoui à démissionner : "Nous réitérons notre engagement en faveur du peuple et de ses revendications et demandons à M. Bedoui ainsi qu'aux membres de son gouvernement illégitime de démissionner."