Pour ceux qui tablaient sur une présence massive des manifestants à Oran pour ce 29e mardi des étudiants, jour férié oblige, il n'en fut rien, même si la ferveur populaire compensait volontiers la quantité contestataire. Si le nombre a fait défaut, l'esprit révolutionnaire était toujours au rendez-vous de cette journée avec le rejet total de la feuille de route de Gaïd Salah. Les constantes du hirak ont été scandées parmi des citoyens spectateurs qui se sont contentés de sortir leur téléphone portable pour filmer le cortège des manifestants. Certains commentaires affligeants entendus çà et là étaient d'ailleurs en total décalage avec l'événement. Et comme pour toutes les contestations précédentes, les symboles du pouvoir actuel ont été ciblés par les chants et slogans des manifestants qui ont appelé à ne pas aller aux urnes avec les conditions actuelles imposées par l'état-major de l'ANP, en exigeant l'application des articles 7 et 8 de la Constitution. "FLN, RND, Bensalah, Bedoui, Gaïd Salah, dégagez", ce slogan résume, à lui seul, la plate-forme citoyenne qui refuse également le pouvoir militaire. "Dégage hokm al-aâskar" a fusé de la foule, aux côtés des "Généraux à la poubelle et l'Algérie aura son indépendance". "Gaïd Salah, voti wahdak" (Gaïd Salah, tu peux voter tout seul), "Asmaâ ya doubaba, haka aâlamni baba, makanch l'vote mâa el-îissaba" (Ecoute, toi le troll, mon père m'a appris qu'il n'y a pas d'élections avec la bande), des slogans qui ont été scandés, alors que des pancartes brandies appelaient aussi au boycott des urnes. "Le boycott des élections est un devoir national" ou encore "L'emprisonnement des corrompus ne suffit pas à lui seul, il faut dissoudre les partis de la corruption", pouvait-on encore lire. Mais celui qui a décroché la palme de l'impopularité reste le vice-ministre de la Défense, accusé de rouler pour les Emiratis : "Gaïd Salah chiyate el-imarate", "Gaïd Salah ne nous gouverne pas", "La ilaha ila Allah, Mohammed rassoul Allah, Gaïd aâdouw Allah" (Il n'y a qu'un seul Dieu, Mohammed est son prophète et Gaïd est l'ennemi de Dieu). Si la marche s'est déroulée dans le calme, un incident, qui s'est produit près du bureau de poste de Miramar, est venu pourtant contrarier son esprit bon enfant lorsqu'un voleur, profitant de la foule, a arraché le téléphone portable des mains d'une manifestante. Il a été rattrapé par des jeunes qui le lui ont repris. Pour beaucoup, ce vol à l'arraché n'est qu'une vulgaire tentative pour faire diversion.