Il n'a même pas eu le temps de savourer sa liberté… provisoire. Des hommes en civil l'ont appréhendé chez lui, le lendemain de sa libération, sans même informer sa famille et sa défense de son lieu de détention. Figure emblématique du mouvement populaire de contestation du régime actuel et coordinateur national de l'Union démocratique et sociale, Karim Tabbou a été placé, ce jeudi après-midi, à nouveau, en détention préventive, cette fois-ci par le tribunal de Sidi M'hamed d'Alger, annonce son avocat, Me Mustapha Bouchachi, qui précise que, pour l'instant, il ne dispose pas d'"informations sur les raisons de cette nouvelle incarcération, ni sur la nature des accusations portées contre lui". Moins de vingt-quatre heures après sa libération, Karim Tabbou a été interpellé vers 8h30, à son domicile situé à Douéra. Sa famille et sa défense étaient jusqu'à hier, en fin de matinée, sans nouvelles de lui. Mustapha Bouchachi s'est déplacé jeudi au tribunal de Koléa, où il a été présenté lors de sa précédente arrestation, mais le procureur de la République lui a affirmé qu'"il n'avait pas un dossier Tabbou". D'instance judiciaire à une autre, le collectif de défense a fini par trouver sa trace. Ses avocats, Mes Abdelghani Badi et Mustapha Bouchachi, dénoncent une violation de l'article 51 du code de procédure pénale. L'article en question stipule que, "tout en veillant au secret de l'enquête, l'officier de police judiciaire est tenu de mettre à la disposition de la personne gardée à vue tout moyen lui permettant de communiquer immédiatement avec sa famille et de recevoir des visites". Me Bouchachi rappelle que la première fois Karim Tabbou a appelé son épouse, "mais cette fois-ci rien". Ses amis et tous ceux qui ont essayé de l'appeler, dès qu'ils ont appris l'information de son arrestation, n'ont pas pu le joindre. Même sa famille n'était pas au courant du lieu de sa détention. D'ailleurs, elle a rendu publics deux communiqués dans lesquels elle s'interrogeait sur son lieu de détention. Hier à 11h30, dans un poste sur facebook, elle a exprimé à nouveau son inquiétude : "Après plus de 24 heures de l'arrestation de Karim Tabbou, une longue journée d'hier et une nuit cauchemardesque pleine d'inquiétudes et d'incertitude, nous avons le regret de vous informer qu'à cette heure précise, nous demeurons sans nouvelles du sort réservé à notre fils et frère." Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme, a estimé, pour sa part, que les circonstances de l'embarquement de Karim Tabbou relèvent d'une "situation grave qui suscite beaucoup de questions". Interpellé une première fois, le mercredi 11 septembre, le porte-parole de l'Union démocratique et sociale (UDS, parti non agréé) a été placé, le lendemain, sous mandat de dépôt, par le juge d'instruction près le tribunal de Koléa pour atteinte "au moral des troupes de l'armée". Mais la chambre d'accusation de la cour de Tipasa a décidé, mercredi dernier, de le remettre en liberté provisoire, en attendant la programmation de son procès. Par ailleurs, deux militants de l'association RAJ ont été, également arrêtés, avant-hier à Alger-Centre. "Il s'agit de Karim Boutata et d'Ahcène Kadi. Nous nous inquiétons beaucoup de leur sort", a indiqué Me Abdelghani Badi.