Au moins cinq personnes ont été mortellement touchées à Bagdad par des grenades lacrymogènes. Le président irakien Barham Saleh a proposé, jeudi, des élections anticipées en Irak, loin des espérances du mouvement de contestation qui réclame la "chute du régime" tout entier après des violences qui ont fait plus de 250 morts. M. Saleh, qui a engagé une série de rencontres avec les chefs de parti depuis plusieurs jours, a ajouté que son Premier ministre Adel Abdel Mahdi, sur la sellette, était "d'accord pour démissionner" à condition que les blocs au Parlement s'entendent sur un remplaçant, ce que ces derniers ne parviennent pas à faire. M. Abdel Mahdi, arrivé au pouvoir après les législatives de 2018, avait déjà proposé mardi de démissionner si les partis se mettaient d'accord sur un nouveau Premier ministre. Quel que soit le sort du chef du gouvernement, "j'approuverai des élections anticipées" après le vote d'une "nouvelle loi électorale", qui sera soumise au Parlement "la semaine prochaine", a déclaré M. Saleh. Mais pour les manifestants sur la place Tahrir de Bagdad, "la démission d'Abdel Mahdi n'est qu'une partie de la solution". Selon les Irakiens en colère, Barham Saleh "veut gagner du temps". Les manifestants mobilisés jour et nuit à Bagdad et dans des villes du Sud assurent qu'ils ne rentreront chez eux qu'une fois leurs exigences satisfaites : une nouvelle Constitution et un départ de l'ensemble de la classe politique jugée corrompue et inapte. Le départ de M. Abdel Mahdi, un indépendant sans base partisane ou populaire, ne peut passer que par le Parlement qui peut lui retirer sa confiance et lui trouver un remplaçant. Depuis lundi, cette Assemblée réclame qu'il se présente devant elle. En vain. Elle a accepté jeudi sa condition : que la séance soit retransmise en direct à la télévision. Dans l'un des pays les plus corrompus au monde où les postes sont répartis en fonction des confessions et ethnies, le système politique créé après la chute de Saddam Hussein en 2003 doit être entièrement remanié, disent les manifestants. Mais, jusqu'ici, ce sont ces divisions selon des lignes communautaires ou d'allégeances aux puissances influentes ennemies — l'Iran et les Etats-Unis — qui dictent la politique. À Diwaniya, les étudiants sont sortis, de même qu'écoliers et enseignants en grève générale, ou encore les fonctionnaires. À Hilla, Nassiriya, Samawa et Amara, de nouveaux rassemblements se sont aussi formés jeudi et vendredi. La première semaine de contestation, du 1er au 6 octobre, s'est soldée, selon un bilan officiel par la mort de 157 personnes, surtout des manifestants abattus par des "tireurs" que l'Etat n'a toujours pas identifiés. Le mouvement a repris le 24 octobre et cent personnes ont été tuées depuis. Jeudi, au moins cinq personnes ont été mortellement touchées à Bagdad par des grenades lacrymogènes, "jamais vues" selon Amnesty International.