En coupant internet, les autorités irakiennes espèrent freiner la mobilisation citoyenne qui prend de l'ampleur chaque jour, malgré la répression meurtrière qui a déjà fait plus de 270 victimes depuis le 1er octobre, selon plusieurs sources. De nouvelles violences meurtrières ont marqué hier les manifestations que connaît l'Irak depuis début octobre dernier à Bagdad et dans d'autres villes du pays, selon les médias locaux et les agences de presse. Mais aucune source n'était encore en mesure de fournir un bilan précis sur le nombre de morts et de blessés qui a été enregistré hier, alors que les autorités ont de nouveau coupé internet, faisant craindre un énième chaos à huis clos. Le dernier bilan des manifestations depuis le 1er octobre a dépassé la barre des 260 victimes, dont 3 morts dans la nuit de lundi à hier. Ceci sans oublier les 5 autres manifestants tués durant la journée de lundi à Bagdad. Les forces de l'ordre ont utilisé des gaz lacrymogènes et usé de tirs à balles réelles, notamment dans la capitale où les manifestants avaient tenté de se rassembler devant des bâtiments officiels, après avoir été empêchés lundi d'atteindre la "Zone verte", où se trouvent des représentations diplomatiques étrangères, des sièges d'entreprises et quelques édifices publics irakiens. À Kerbela, un des épicentres de la contestation en province et à dominante chiite, les manifestants ont réussi à se rassembler en fin de journée à la place centrale de la ville, après avoir été chassés par les services de sécurité durant la matinée. La police a utilisé les bombes lacrymogènes pour les disperser, selon les images diffusées par les médias locaux, ignorant les appels à la retenue et l'arrêt de cette violence disproportionnée à l'égard des manifestants. Hier encore, le Comité onusien de défense des droits de l'homme a appelé les autorités à cesser leur répression contre les manifestants, déterminés à faire partir le régime de Bagdad, accusé de corruption et d'avoir échoué à sortir l'Irak du chaos de presque deux décennies de guerre. Lundi, le Premier ministre Adel Abdel Mahdi a tenu une réunion de sécurité avec les responsables de l'armée et de la police, en présence du président du Parlement et du haut responsable de la Cour suprême, pour tenter de trouver une solution à la crise, selon un communiqué de son cabinet, repris par les médias irakiens. Mais peu importe les décisions qui seront prises ou les réformes qui seront annoncées, la rue irakienne poursuivra son mouvement jusqu'au départ de l'actuel gouvernement, la tenue de nouvelles élections sans les figures actuelles du régime à Bagdad. Ce qui n'est pas pour faciliter la mission du Premier ministre et de son équipe, confrontés à l'accentuation du mouvement de désobéissance civile qui a débuté dimanche. Pour rappel, des secteurs comme l'éducation et l'enseignement universitaire, ainsi que l'administration publique ont rejoint le mouvement de contestation depuis quelques jours. Et comme au Liban, les barrières confessionnelles ont été brisées par les manifestants qui réclament plus de démocratie, de liberté d'expression et un renouvellement de la classe politique en dehors de tout clivage confessionnel.