“En quatrième lieu, et tout en restant unis dans la lutte implacable que nous continuerons à mener contre le terrorisme et pour votre sécurité, le projet de charte vous propose les mesures concrètes suivantes….” Le discours présidentiel lui-même l'accorde : le dernier des quatre volets de ce qu'il appelle “les grandes lignes” de la future charte pour la paix et la réconciliation nationale expose des mesures “concrètes”. Les chapitres précédents (définition de la crise, hommage aux martyrs du devoir national, reconnaissance au sacrifice consenti dans le cadre de la lutte antiterroriste) ayant statut de déclaration de principe, ce sont donc les mesures de grâce en faveur des terroristes qui constituent l'objet de la charte que nous sommes appelés à entériner le 29 septembre prochain. Le projet aura à rattraper le paradoxe né de la forclusion, depuis le 13 janvier 2000, des effets de la loi portant concorde civile, même s'il est précisé que l'extinction des poursuites ne concerne pas les personnes impliquées “dans des massacres, des viols ou des attentats à l'explosif”. En fait, il aura aussi à rectifier, dans le sens d'une plus grande indulgence, la loi portant concorde civile : il n'est plus question d'exclure de sa grâce tous ceux qui “ont les mains tachées de sang”, mais les seuls auteurs de crimes collectifs et de viols. En plus des bénéficiaires de la loi de juillet 1999, les terroristes déjà condamnés ou même détenus profiteront de la même grâce, avec la même restriction. Mais la restriction à ces mesures d'abandon de poursuites et de grâce est battue en brèche par les commutations et les remises de peine prévues au bénéfice de “tous les autres individus condamnés définitivement, détenus ou recherchés pour des actes de terrorisme, qui ne sont pas concernés par les mesures de grâce et d'extinction de poursuites énoncées ci-dessus”. Ainsi, les exclus des premières mesures peuvent finalement, par le truchement des commutations et des remises de peine, être rattrapés. Y compris quand ils ne sont pas en situation de détention, c'est-à-dire en fuite. Au demeurant, l'expérience de la concorde civile a montré, quand il s'est agi d'écarter “ceux qui ont les mains tachées de sang”, que le discernement a systématiquement profité au repenti. Que dire quand il s'agira de confondre les candidats à l'amnistie d'avoir participé aux massacres collectifs, aux viols et aux attentats à la bombe ? En attendant de découvrir la lettre intégrale du projet de charte, c'est bien d'amnistie qu'il s'agit, tant le souci du projet est d'extraire à la justice un maximum de terroristes. Dans certains cas, la grâce n'attendra même pas que le destinataire soit à portée de la loi, vu que l'amnistie profitera aussi aux condamnés par contumace et aux recherchés. Si le texte soumis à référendum confirme l'orientation ainsi résumée par le discours du Président, c'est bel et bien d'un référendum pour l'amnistie qu'il s'agit. Pourquoi donc a-t-on choisi la paraphrase pour proposer un choix qu'on évoque depuis si longtemps ? Pourtant, le Président a marqué sa détermination à faire aboutir son projet. C'est une véritable mise en garde qu'il adresse à “des voix connues qui ne manqueront pas de s'élever pour tenter de s'opposer à cette attente populaire légitime”. Le ton est donné. Mustapha H