Les manifestants ont brandi pour la circonstance des écriteaux qui rappellent aux tenants du pouvoir les revendications de millions d'Algériens qui rejettent l'élection du 12 décembre et réclament un retour à la volonté populaire. Grandiose était hier, dans les artères d'Alger-Centre, la 41e marche consécutive de contestation estudiantine contre les résidus du régime bouteflikien. Les étudiants sont revenus encore plus nombreux en ce nouveau mardi pour réitérer leur "non à la présidentielle du 12 décembre" et réaffirmer leur fidélité aux engagements pris par le peuple le 22 février 2019. Les marcheurs ont emprunté le parcours habituel du hirak estudiantin, de la place des Martyrs jusqu'à la place Maurice-Audin, en passant par la rue Larbi-Ben M'hidi, l'avenue Pasteur, le boulevard Amirouche et la rue Mustapha-Ferroukhi. Le dispositif sécuritaire habituel n'a pas manqué, lui non plus, son mardi, mais sans recourir à la matraque. Les fourgons cellulaires et les gros engins bleus étaient stationnés tout le long de l'itinéraire de la manif. Le coup d'envoi de la manifestation a été donné à 10h40. Immédiatement après avoir entonné l'hymne national Qassaman, les jeunes universitaires, accompagnés de nombreux citoyens, se sont mis à scander haut et fort un slogan qui renseigne bien sur leur résolution à boycotter, à l'instar de millions d'Algériens, le scrutin présidentiel prochain : "Douze, douze la yadjouz" (Aller voter jeudi 12 décembre, c'est commettre un péché). Et de se mettre à jurer à l'unisson : "Allah Akbar, Allah Akbar makanch l'vote", ou encore "Nous n'irons jamais voter de cette manière, même si vous mobilisez la BRI et sâaiqa." Les manifestants ont brandi pour la circonstance des écriteaux qui rappellent aux tenants du pouvoir, qui refusent d'entendre depuis près de dix mois les millions d'Algériens qui sortent chaque vendredi, que "le peuple est assez mûr pour prendre en charge son destin et bâtir son avenir, mais en passant par une période de transition". "Notre objectif suprême est de changer l'ordre politique ; le 12-12 est un non-événement" ou encore : "Nous avons déjà délogé la mafia de Bouteflika, votre tour viendra Inch' Allah." À l'entame de la rue Ali-Boumendjel, adjacente à la rue Abane-Ramdane abritant le bâtiment du tribunal de Sidi M'hamed, les étudiants ont fait l'impasse sur le procès reporté des deux ex-responsables du gouvernement Sellal et Ouyahia. Ils ont préféré enchaîner sur l'incontournable doléance du peuple : "Nous avons dit Etat civil et non pas militaire." Les premières vagues de manifestants reprennent le nouveau mot d'ordre du hirak qui appelle à la grève générale à partir de dimanche prochain : "Le 8 décembre, c'est la grève générale." En atteignant le numéro 20 de la rue Larbi-Ben M'hidi, soit juste après la station de métro Ali-Boumendjel, les étudiants se sont mis en mode off, par respect à un décès dans le quartier. Ce silence-hommage a été rompu par des "Djazaïr horra demokratia", plus loin, à la place Emir-Abdelkader. Les manifestants reprennent en chœur un slogan phare de la révolution citoyenne : "Nous sommes les enfants d'Amirouche, nous ne ferons pas marche arrière, le vent va tourner et nous gagnerons, Inch'Allah."