L'Algérie a observé dès le début de la crise en Libye, en 2011, une attitude de neutralité en se maintenant à équidistance entre les parties libyennes en conflit. Alger connaît depuis hier et sur deux jours un ballet diplomatique des responsables libyens et turcs venus défendre leur accord maritime et militaire que le gouvernement libyen d'union nationale (GNA, reconnu par l'ONU) a récemment conclu avec Ankara, et dont la mise en œuvre est imminente, selon le président turc Recep Tayyip Erdogan, hier. Le président du Conseil présidentiel, également chef du GNA, Fayez al-Sarraj, est arrivé à Alger le premier, où il s'est entretenu avec le ministre des Affaires étrangères, Saïd Boukadoum, et le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, avant d'être reçu par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune. La rencontre entre MM. Tebboune et Al-Sarraj "s'inscrit dans le cadre des concertations permanentes entretenues avec les frères libyens et permettra d'échanger les vues sur l'aggravation de la situation en Libye et d'explorer les voies susceptibles de surpasser cette conjoncture difficile", avait indiqué un communiqué de la présidence de la République, sans entrer dans les détails. Dans un autre communiqué, rendu public par le ministère des Affaires étrangères, l'Algérie a réitéré "son refus absolu de toute ingérence étrangère en Libye et appelle toutes les composantes et parties libyennes à faire prévaloir l'intérêt suprême et à un retour rapide au processus du dialogue national inclusif pour parvenir à des solutions à même de faire sortir ce pays frère et voisin de la crise dont il souffre et de construire un Etat d'institutions où le peuple libyen souverain vivra en paix et en sécurité et jouira de la stabilité au sein d'un seul et même pays". La conclusion de l'accord turco-libyen a cristallisé toutes les tensions aussi bien en Libye, où il est rejeté par une partie des Libyens, que chez les pays voisins et les puissances occidentales qui l'ont fermement dénoncé. Cela a mis l'Algérie en alerte au niveau militaire, avec le renforcement de la surveillance de sa frontière avec la Libye. Au niveau diplomatique, d'intenses échanges continuent d'avoir lieu avec les Libyens et les pays impliqués dans la crise en Libye, dans le but de relancer le processus politique, à l'arrêt depuis deux ans. Le ministre turc des Affaires étrangères est arrivé, quant à lui, en fin de journée, pour tenter de convaincre l'Algérie de la décision d'Ankara de déployer ses soldats en Libye, en soutien aux forces du GNA dans leur guerre contre le général à la retraite, Khalifa Haftar, qui mène une offensive militaire contre Tripoli depuis le 4 avril dernier. Tout en défendant le principe d'un dialogue politique pour une sortie de crise, l'Algérie a prôné l'option d'un dialogue libyen-libyen, loin de toute interférence étrangère. Une conférence sous l'égide de l'ONU devait se tenir en avril dernier dans la ville de Ghadamès, dans l'Ouest libyen, frontalier avec l'Algérie. Mais l'opération militaire engagée par Khalifa Haftar à la veille de cette conférence a compromis toute chance de relance des discussions entre les parties libyennes.