L'émissaire de l'ONU pour la Libye, Ghassan Salamé, a dénoncé jeudi devant le Conseil de sécurité les violations continues des engagements pris le 19 janvier à Berlin par la communauté internationale pour arrêter les ingérences et les livraisons d'armes aux belligérants. "Toutes ces manœuvres pour ravitailler les deux parties menacent de précipiter une nouvelle conflagration bien plus dangereuse. Elles violent l'esprit et la lettre de la conférence de Berlin", a souligné l'émissaire lors d'une liaison vidéo avec le Conseil de sécurité. "J'exhorte les parties et leurs soutiens étrangers à renoncer à toute action imprudente et à renouveler leur engagement exprimé pour œuvrer en faveur d'un cessez-le-feu", a-t-il ajouté. L'émissaire a notamment évoqué des "renforcements militaires" dans les deux camps – les forces du général Khalifa Haftar, homme fort de l'Est cherchant à conquérir Tripoli depuis avril, et celles de Fayez al-Sarraj, chef du Gouvernement d'union nationale (GNA) reconnu par l'ONU. Ils "risquent de relancer le spectre d'un conflit large engloutissant l'ensemble de la région", a averti Ghassan Salamé. "Les belligérants ont continué de recevoir une quantité considérable d'équipements modernes, de combattants et de conseillers fournis par leurs soutiens étrangers, en violation de l'embargo sur les armes ainsi que des engagements pris par les représentants de ces pays à Berlin", a rapporté le responsable de l'ONU. Il a notamment cité le renforcement des forces de Haftar le long des lignes de front dans Tripoli "avec des armes, de l'équipement, des éléments d'infanterie, incluant des combattants étrangers". Il y a eu "une augmentation notable de vols cargos – plusieurs par jour – à l'aéroport Benina et sur la base aérienne Al-Khadim, dans l'est de la Libye, pour fournir des équipements militaires", a-t-il précisé. "Dans le même temps, des combattants étrangers sont arrivés par milliers à Tripoli et se sont déployés auprès des forces libyennes" soutenant le GNA. Encore mardi, des navires étrangers, y compris des bateaux de guerre, ont été vus au large de Tripoli, en plus de cargos, a ajouté Ghassan Salamé. Depuis la conférence de Berlin, "110 violations de la trêve" obtenue par la Russie et la Turquie ont été constatées, a indiqué l'émissaire. Il a aussi confirmé que la première réunion de la commission militaire conjointe, composée de cinq membres représentant Haftar et cinq membres représentant le GNA, ne s'était pas tenue à Genève mardi comme prévu, faute de participation des représentants du maréchal Haftar. Le Conseil de sécurité discute depuis la semaine dernière d'un texte du Royaume-Uni qui endosse les résultats du sommet de Berlin, réclame un cessez-le-feu, une application stricte de l'embargo sur les armes, exige de tous les Etats membres qu'ils s'abstiennent d'intervenir dans le conflit et demande au Secrétaire général des options pour contrôler une trêve.