Pendant presque une heure, à Alger-Centre, policiers et citoyens se livrent à un véritable jeu du chat et de la souris. Les regroupements sont empêchés de la même manière à la place du 1er-Mai et à Bab El-Oued. Quelques dizaines de citoyens ont tenté de reproduire, hier dans la capitale, la mobilisation exceptionnelle de samedi dernier, jour anniversaire du mouvement citoyen, mais ils n'ont pas réussi à s'imposer face à un dispositif de sécurité fluide mais efficace dans l'intervention rapide et ciblée. Le noyau des irréductibles a tenté, une première fois en fin de matinée, d'entamer la marche à partir de la rue Khelifa-Boukhalfa, à quelques encablures de la mosquée Errahma. Ils crient comme mot d'ordre : "Dawla madania, machi âaskaria" (Etat civil et non militaire) et "Had el-hirak wajeb watani" (Le hirak est un devoir national). Il est, néanmoins, dispersé en quelques minutes par des policiers en uniforme. Le carré, déterminé, se reforme en contrebas de la rue Didouche-Mourad, à proximité de la place Audin. À cet endroit, des agents de la Sûreté nationale en civil entrent en action et font la chasse aux manifestants potentiels. Des étudiants et des hirakistes connus, dont l'activiste Zaki Ouhadi, sont embarqués dans deux fourgons cellulaires, stationnés en deuxième position à côté de véhicules légers de la DGSN. D'autres sont bastonnés. Khalti Baya, une femme d'un âge certain, devenue presque une égérie de la révolution en raison de son assiduité aux actions de rue malgré sa maladie lourde (un cancer), reçoit aussi des coups, selon des témoignages, provoquant l'indignation des passants et des riverains. Un jeune manifestant échappe à une arrestation en renonçant à son sac-à-dos, resté dans les mains d'un élément de la Sûreté nationale. Le groupe se disloque. Des personnes, par grappes, se replient sur les terrasses des cafés ou collent aux vitrines des magasins de le rue commerçante, épiant le mouvement des policiers. De leur côté, ces derniers sont à l'affût de la moindre tentative de relancer le rassemblement. De jeunes gens, de passage, sont systématiquement arrêtés et sommés de présenter leur pièce d'identité. Pendant presque une heure, policiers et citoyens se livrent à un véritable jeu du chat et de la souris. À 13h30, des échos parviennent de la rue Victor-Hugo. Des slogans hostiles au régime sont scandés. Ils sont aussitôt réduits au silence par une charge policière. Les regroupements sont empêchés de la même manière à la place du 1er-Mai et à Bab El-Oued. La deuxième marche du samedi n'a pas eu lieu à Alger, probablement aussi par défaut d'un ralliement massif de citoyens. Pourtant, dans de nombreuses villes, les rues ont vibré sous les pas de milliers d'Algériens engagés dans la révolution contre le régime.